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Chronologie de la Guerre de 1870 par Gino Segrais – DÉCEMBRE

Cette chronologie reprend les principaux faits nationaux intégrés aux événements du Centre Val de Loire et plus particulièrement du Vendômois…

Mois de Décembre 1870

 

Jeudi 1er décembre

A Champigny-sur-Marne, les deux armées concluent une trêve pour enterrer leurs morts. Les Allemands bombardent Autun et lancent une attaque ; les troupes de Garibaldi les repoussent à l’aide des Mobiles de Saône-et-Loire et des francs-tireurs des Alpes-Maritimes.

Ce jeudi, la 1ère Division du 16ème Corps de Chanzy remporte les combats de Villepion et de Faverolles près de Loigny-la-Bataille (Eure-et-Loir) où les moblots du Loir-et-Cher (75ème Mobile), intégrés dans la Division de l’amiral Jauréguiberry, se distinguent en faisant trente prisonniers. Mais le prince Frédéric-Charles accentue la pression en rassemblant cent cinquante mille combattants et quatre cents canons.

Les Vendômois, endurant la rigueur du froid, s’interrogent sur l’immobilisme de l’Armée de la Loire et de son chef le général Aurelle de Paladines. La préoccupation du jour est l’organisation des ambulances. Car on manque de place pour accueillir les blessés et les malades.  On a recours aux établissements religieux et aux maisons des particuliers.

Vendredi 2 décembre

Sur la Marne, le général von Fransecky lance une contre-attaque et reprend le contrôle de Champigny-sur-Marne. Chacune des deux armées reste ensuite sur ses positions sans pouvoir se déborder.

Le commandant en chef prussien lance de nombreuses troupes sur Artenay, Patay (Loiret) et Loigny (Eure-et-Loir). Chanzy ne peut opposer que trente-cinq mille soldats sur un front de douze kilomètres et doit reculer. En arrivant à Loigny, le 75ème Mobile du Loir-et-Cher affronte une troupe bavaroise qui se replie sur le château de Goury. Les moblots sont arrêtés dans le parc du château où des Prussiens sont solidement retranchés. Ils sont obligés de battre en retraite sur Loigny où ils s’engagent dans une bataille de rue, puis ils se retirent sur Terminiers (Eure-et-Loir) où ils campent au soir. Le régiment du Loir-et-Cher subit de lourdes pertes, en particulier le 2ème Bataillon, qui a perdu les deux-tiers de ses hommes dont la 7ème Compagnie de Montoire qui déplore la disparition du capitaine Schneider. La cavalerie du général de Sounis couvre la retraite de ce qui reste du 16ème Corps ; il est blessé et fait prisonnier. Le bilan est lourd : cinq mille Français tués et quatre mille Allemands. De nombreux blessés agonisent la nuit par une température de moins vingt degrés.

A Vendôme, le son du canon augmente et se rapproche sans que les habitants aient des nouvelles précises des combats. Deux ordres les inquiètent, l’interdiction de circuler en ville sans laissez-passer et la réquisition de pelles et de pioches par le 21ème Corps.

Des instructions émanant du gouvernement de Tours stipulent que chaque garde nationale proche des avant-postes ennemis doit établir des postes de garde sur chaque route importante en raison des nombreux espions qui circulent et doit monter des embuscades contre les reconnaissances ennemies. Le matériel saisi reste la propriété de la commune. Tous les fusils de chasse doivent être remis à la commune pour être distribués à la garde nationale.

Samedi 3 décembre

Sur les bords de la Marne, les Français ayant souffert du froid et éprouvé de lourdes pertes (neuf mille hommes), le général Ducrot ordonne la retraite sur Paris. Le général Bourbaki arrive à Bellegarde (Loiret) pour prendre le commandement du 18ème Corps. Lorsque Gambetta apprend que les troupes des assiégés de Paris ont occupé Epinay, il pense qu’il s’agit d’Epinay-sur-Orge au sud de la capitale ; en réalité il est question d’Epinay-sur-Seine dans la banlieue nord. Cette confusion lui fait envisager un nouveau plan pour faire mouvement sur Paris.

A Terminiers, le 75ème Mobile se réorganise et reçoit l’ordre de se replier sur Patay où il aide à éteindre les incendies causés par l’ennemi et repousse une attaque allemande mettant deux cents ennemis hors de combat. Après quelques escarmouches avec des cavaliers prussiens, il bivouaque dans les bois de Bucy-Saint-Liphard (Loiret). Son commandant le colonel de Montlaur est blessé ; son 1er Bataillon se reforme et ne comporte plus que six cents hommes. Le 2ème Bataillon est réduit à trois cents soldats. Des sous-officiers commandent des compagnies.

Une importante armée en provenance du Mans composée d’éléments du 21ème Corps et de bataillons d’Eure-et-Loir, de l’Orne, d’Ille-et-Vilaine et de la Sarthe défile dans les rues de Vendôme suivie d’interminables convois de voitures. L’arrivée de ces troupes qui dressent leurs tentes au Champ de Mars et l’annonce d’une avancée victorieuse au siège de Paris rassurent la population.  Mais en fin de journée, elle perd ses illusions en apprenant le désastre de Loigny.

Dimanche 4 décembre

Quatre bataillons de l’Armée du Nord, désormais commandée par le général Faidherbe, s’emparent de la forteresse de Ham (Somme). Bourbaki reçoit l’ordre de se rabattre sur Orléans avec le 20ème Corps placé sous son commandement alors qu’il apprend que Aurelle de Paladines recule sur Cercottes (Loiret) et que le général Martin des Paillières est repoussé par les Allemands depuis Chilleurs-aux-Bois (Loiret). L’Armée de Manteuffel progresse vers Rouen et des engagements ont lieu à Bosc-la-Hard, Buchy (Seine-Maritime) et Lyons-la-Forêt (Eure). Le général Briand quitte Rouen dès que ses avant-postes sont refoulés.

La 2ème Division du général Barry du 16ème Corps bat en retraite sur Beaugency (Loiret) et croise la colonne du général Camô appelée en renfort depuis Tours et composée des 16ème et 59ème Régiment de Marche, des 27ème Mobile de l’Isère, du 88ème Mobile d’Indre-et-Loire et des francs-tireurs de l’Ain. La 3ème Division du général Morandy du 16ème Corps fait mouvement vers Chambord.

La rumeur circule à Vendôme que les Prussiens ont pris Mondoubleau sans résistance. On n’arrive toujours pas à résorber l’afflux de blessés. Un habitant de Houssay, M. Prosper Sergent, est réquisitionné par l’armée française avec son cheval et sa voiture. Il se rend à Vendôme d’où il est envoyé vers Lorges (Loir-et-Cher).

Lundi 5 décembre

Deux escadrons de cavalerie de l’Armée de Manteuffel en provenance d’Isneauville (Seine-Maritime) prennent possession de Rouen, ville ouverte. M. de Kératy ayant démissionné, le capitaine de vaisseau de Marivault est nommé commandant du camp de Conlie avec le grade de général de Division auxiliaire.

Le 15ème Corps se retire en désordre vers Salbris (Loir-et-Cher) et Vierzon (Cher). Aurelle de Paladines évacue Orléans.  Comme l’Armée de la Loire est coupée en deux, Gambetta lui retire son commandement et nomme Chanzy à la tête de la Deuxième Armée de la Loire. Ce dernier essaie de préserver la cohésion de ses Divisions. Il est remplacé par l’amiral Jauréguiberry aux commandes du 16ème Corps.

La deuxième Armée de la Loire occupe la position suivante : le 21ème Corps, nouvellement formé, garde la forêt de Marchenoir ; la cavalerie se retire depuis Coulmiers sur Chandry (Loir-et-Cher) ; la 1ère Division du 16ème Corps dont le 75ème Mobile gagne Lorges (Loir-et-Cher) avec la Division Deflandre du 17ème Corps ; les deux autres Divisions de ce dernier Corps se dirigent depuis Huisseau-sur-Mauves jusqu’à Cravant (Loiret) tandis que la Division Barry marche sur Mer (Loir-et-Cher). Chanzy est à Josnes (Loir-et-Cher). Meung-sur-Loire est occupée par les Prussiens.

Bourbaki ramène les 18ème et 20ème Corps sur la rive gauche de la Loire ; il franchit le fleuve à Jargeau et Sully-sur-Loire (Loiret) et souhaite gagner Nevers par Gien en ralliant le 15ème Corps qui est à Salbris. Gambetta lui soumet un nouveau plan de campagne. Il doit suspendre son mouvement sur Gien, réunir les 18ème et 20ème Corps et se diriger sur Montargis (Loiret) ; il devra ensuite se porter sur Fontainebleau et Melun (Seine-et-Marne) afin de délivrer Paris. Bourbaki répond que c’est impossible.

La garde nationale vendômoise enregistre la démission de son commandant, M. Comte ainsi que celle du capitaine Patez. Ils sont remplacés d’une part par M. Avril et d’autre part par le lieutenant Courcimault. Les troupes arrivées la veille partent pour la forêt de Marchenoir. A la gare on embarque un bataillon des Bouches-du-Rhône à destination de Tours.

Mardi 6 décembre

Gambetta adresse une dépêche aux préfets et sous-préfets démentant la mauvaise situation de l’Armée de la Loire. Elle continue son mouvement de retraite, la première avec Bourbaki vers la Sologne et le Berry, la deuxième avec Chanzy vers la Touraine. Le général Camô, en position sur les hauteurs de Foinard (Loiret) repousse une attaque allemande au-delà de Meung-sur-Loire. Le 75ème Mobile parvient à Villorceau (Loiret) sous la neige tout en combattant.  L’ennemi a franchi la Loire en empruntant la rive gauche.

Le général de Marivault réclame l’évacuation des quarante-trois mille soldats du camp de Conlie, qui est devenu un cloaque où on s’enfonce à mi-jambe. A peine la moitié des soldats est équipée de fusils de onze modèles différents. Les troupes sont démoralisées. Le général prescrit aux préfets de lui suspendre l’envoi de mobilisés.

Les Prussiens occupent la ville de Duclair (Seine-Maritime) et pratiquent la politique de la terre brûlée dans toute la région.  Bourbaki repousse l’ennemi à Gien et décide de se replier sur Bourges pour reconstituer ses troupes. La 3ème Division du 21ème Corps du général Jaurès se heurte à La Vallière et Marolles (Loir-et-Cher) à la 22ème Division prussienne et la fait reculer jusqu’à Binas (Loir-et-Cher). A Cravant et Beaumont (Loiret), l’ennemi se replie devant la 1ère Division du 17ème Corps. Le général Camô réoccupe Messas (Loiret). Tous ces combats sont des succès pour la deuxième Armée de la Loire. Le 75ème Mobile est mis au repos et ne participe à aucun engagement.

On apprend à Vendôme que les Mobiles du Loir-et-Cher ont subi de lourdes pertes à la bataille de Loigny et qu’Aurelle de Paladines aurait évacué Orléans. Tous ces bruits répandus inquiètent la population.

Mercredi 7 décembre

Après avoir reculé, la Deuxième Armée de la Loire se maintient sur une ligne qui part de Josnes jusqu’à la vallée du Loir. L’armée du Grand-Duc de Mecklembourg est tenue en échec à Cravant, à Marchenoir, à Beaumont et à Baule (Loiret). Un escadron de dragons du 15ème Corps refoule à Nouan-le-Fuzelier la VI° Division de cavalerie allemande. Un engagement a lieu à Salbris où des soldats du 15ème Corps tiennent leur position. Bourbaki repousse l’ennemi à Gien (Loiret), mais décide de se replier vers Bourges pour mettre au repos ses Corps d’Armée débandés et démoralisés.

Le désordre règne au sein de la garde nationale de Vendôme qui enregistre encore des démissions ce qui provoque l’incompréhension des habitants.

Jeudi 8 décembre

La délégation gouvernementale de Tours se replie sur Bordeaux. Un accord est conclu entre les Etats de la Confédération du sud et la Confédération d’Allemagne du nord sur la future constitution allemande. A Rouen, Manteuffel forme des colonnes mobiles chargées de battre le pays ; elles pénètrent à Vernon et Evreux (Eure).

A la Deuxième Armée de la Loire, les combats s’engagent à nouveau sous la neige à Poisly près de Lorges (Loir-et-Cher) et à l’est de la forêt de Marchenoir. On continue de se battre à Villorceau, Cernay, Marolles et Villechaumont. Les Allemands ressentent une résistance à laquelle ils ne s’attendaient pas de la part du 21ème Corps du général Jaurès. Malgré cela, ils enlèvent le village de Cravant. La 3ème Division du 17ème Corps du général Deflandre reprend le village ; au cours de l’engagement le général Deflandre est mortellement blessé. Il est remplacé par le général de Jouffroy d’Abbans qui, à court de munitions, est obligé de battre en retraite sur Ourcelles (Loir-et-Cher). Le général Camô qui tient le village de Messas reçoit l’ordre de Tours de se replier en arrière de Beaugency et va se positionner sur Tavers (Loiret). Camô est blessé et il est relevé par le général Tripart. Le 49ème Mobile de l’Orne tient en échec les Allemands qui tentaient de bousculer un détachement du 21ème Corps de Jaurès. Ce dernier, dans l’après-midi, débouche de la forêt de Marchenoir et, à l’aide de deux bataillons de la Sarthe en réserve, force l’ennemi au repli. La 1ère Division du général Deplanque fait reculer les Bavarois sur Beaumont tandis que le 75ème Mobile a repris le combat et participe à la prise de Le Mée (Loiret), puis bivouaque à Villorceau. Le général Jauréguiberry engage sa réserve composée des Mobiles de l’Yonne et du Cantal et franchit la ligne Cravant-Beaugency alors que le général Barry annonce à Chanzy qu’il continue sa retraite sur Blois étant donné la faiblesse de ce qui reste de sa Division.

Sur la rive gauche de la Loire, la XXV° Division du IX° Corps allemand, sous les ordres du prince Louis de Hesse, prend position à Saint-Laurent-des-Eaux pour y cantonner. Dans la nuit, elle reçoit l’ordre de se porter sur Blois. La 1ère Brigade de la division Morandy (36ème de Marche et Mobile de la Charente-Inférieure) occupe le parc de Chambord soutenu en avant-garde par le bataillon du commandant La Cécilia des francs-tireurs de la Seine.

Le problème d’accueil des blessés perdure à Vendôme et on décide d’installer des lits au rez-de-chaussée du lycée. On dirige les plus valides loin des combats vers Le Mans, tandis qu’à Blois le château accueille sept cent blessés. Les soldats en transit dans la ville campent sur le sol couvert de neige. Les habitants constatent que le bruit du canon se rapproche chaque jour. Des batteries d’artillerie débarquent en gare en provenance de Toulouse. Depuis trois jours à Villavard et Montoire, on entend le son du canon.

Vendredi 9 décembre

Une colonne de Manteuffel marche sur Dieppe où elle entre sans résistance. Surpris par l’opposition française, le Grand-Duc de Mecklemebourg demande au prince Frédéric Charles de le renforcer au lieu de se porter vers Bourges. Moltke en profite pour nommer ce dernier commandant en chef de toutes les troupes allemandes engagées sur la Loire. Le but est de progresser par les deux rives vers Tours. Attendant les renforts, de Mecklembourg temporise.

La Deuxième Armée de la Loire se maintient sur ses positions. Gambetta rend visite à Chanzy à Josnes. Ils décident de résister autour de la forêt de Marchenoir. Chanzy demande à Bourbaki de se porter à son secours par la Sologne et en remontant par la vallée du Cher. Le 75ème Mobile est obligé de quitter Villorceau à cause de la perte de Beaugency. Il s’installe en position de combat en arrière du ravin de Tavers. Malgré son infériorité numérique, il résiste jusqu’au soir et l’ennemi se retire. Il campe sur la zone de combat en dépit du gel. Le général Barry arrive à Blois avec quelques centaines d’hommes alors que la municipalité a décidé de ne pas se défendre.

Les troupes françaises qui occupent Chambord reçoivent l’ordre de se replier sur Blois. Un contre-ordre leur demande de le réoccuper. La 2ème Brigade de la Division Morandy part dans l’après-midi pour rejoindre Chambord dans la nuit. Entre temps un bataillon du 46ème de Marche est envoyé à Montlivault où, après avoir affronté à l’aide des francs-tireurs de la Sarthe la XXV° Division hessoise, il revient sur Blois. Une compagnie hessoise se porte vers le parc du château où elle ne trouve aucune opposition, les francs-tireurs de la Seine du commandant La Cécilia s’étant retiré à l’intérieur du château. Les Hessois se cachent dans les bois du parc. La 2ème Brigade de la Division Morandy, composée d’un bataillon du 8ème Mobile, de deux bataillons du 71ème Mobile et des soldats du 40ème de Marche, arrive sans soucis dans le parc et forme les faisceaux quand elle est surprise par une intense fusillade qui sème la panique dans les rangs français. Les pertes sont importantes et de nombreux soldats sont faits prisonniers.

A Vendôme, la salle libérée au lycée est déjà remplie de blessés. Un grand nombre d’entre eux attendent qu’on leur trouve pendant la nuit une place par une température de cinq à six degrés. Les alentours de la ville, les routes vers Montoire et Saint-Calais sont encombrées de voitures. Des convois de blessés se dirigeant vers Le Mans croisent des troupes destinées à former de nouveaux régiments. On signale l’arrivée des Mobiles du Gard et de la Vienne.

Samedi 10 décembre

A l’aube, les Prussiens sont débusqués du village d’Origny. Ils essaient de tourner les lignes françaises, mais ils échouent. Leurs attaques dirigées dur l’aile gauche et le centre de la Deuxième Armée de la Loire sont repoussés. Chanzy donne des instructions à suivre par chaque Corps d’Armée en cas de retraite.  Le 21ème devra prendre la direction de Fréteval (Loir-et-Cher) ; le 17ème ira sur Oucques et le 16ème se dirigera sur Pontijou, Le quartier général s’installera à Talcy (Loir-et-Cher). Bourbaki ne répond pas à l’appel de Chanzy de venir à son secours. En fin de soirée, Chanzy ordonne de battre en retraite dès le lendemain matin.

Le 75ème Mobile n’est pas attaqué et reste sur ses positions. Ses soldats n’ont pas pris de repas depuis trois jours. Ils tentent de réquisitionner les bêtes d’un fermier. Ce dernier refuse et ils respectent sa volonté.

A Blois le général Barry fait sauter le pont à sept heures du matin. Ce qui reste de la Division Morandy se retire sur Amboise (Indre-et-Loire) Les Hessois sont sur la rive gauche de Blois et réclament le rétablissement du pont. Gambetta, présent en ville, refuse assurant qu’il y a suffisamment de troupes pour repousser l’ennemi. Le corps franc de Cathelineau, rattaché au 15ème Corps, quitte la Sologne pour Châteauroux.

A Vendôme, le sous-préfet exige que le maire et les conseillers municipaux déclarent s’ils sont pour ou contre la défense de la ville et, sans réponse catégorique de leur part, il menace de les arrêter. Face à cette intimidation, ils décident d’adresser leurs démissions au Préfet du Loir-et-Cher et au Ministère de l’Intérieur.

Dimanche 11 décembre

Un combat se déroule entre la Fère et Chauny (Aisne). Depuis Bourges, Gambetta refuse la démission du maire et du conseil municipal de Vendôme. Face à sa situation précaire et l’état de ses troupes, la Deuxième Armée de la Loire amorce sa retraite vers le Loir et Vendôme sous un dégel qui transforme les routes en fondrières. Le 75ème Mobile entame sa retraite depuis Beaumont. Des soldats de la 8ème Compagnie (les Vendômois) qui ont perdu la trace de leur bataillon rejoignent leur dépôt de Blois où certains suivent le transfert du dépôt vers la Roche-sur-Yon (Vendée) et où d’autres sont désignés pour escorter des prisonniers jusqu’à Bordeaux.

Le sous-préfet de Vendôme convoque à midi la garde nationale en armes, lui annonce son intention de défendre la ville et intime à tous les hommes valides de quitter leurs foyers. Il fait afficher une proclamation informant la population de sa détermination de défendre la ville. Il fait connaître son intention de créer un comité de salut public. Dans l’après-midi, le conseil municipal rappelle par affichage qu’au cours d’une réunion précédente il avait été décidé avec l’accord de l’autorité militaire de ne pas défendre la ville.

Deux batteries françaises arrivent à Montoire en piteux état, n’ayant plus que quatre canons. Les officiers réclament du fourrage à M. Souriau qui hésite à leur en donner, parce qu’ils n’ont pas d’ordre de réquisition réglementaire.  Ils menacent de bombarder sa maison s’il ne procède pas à la livraison. M. Souriau s’exécute. Les artilleurs quittent la ville le lendemain en direction du Mans. Une formation de six mille soldats est annoncée pour arriver dans la journée. Seuls quelques fuyards parviennent à Montoire apprenant à la population l’occupation de Blois par les Prussiens.

Lundi 12 décembre

Le Corps bavarois du général von der Thann vient relever à Orléans le III° Corps prussien qui se dirige sur Blois pour renforcer le X° Corps et les troupes du Grand-Duc de Mecklembourg. Bourbaki lance une opération de diversion sur la ville de Vierzon qui est occupée sans combat. La Deuxième Armée de la Loire atteint la route de Blois à Châteaudun entre Viévy-le-Rayé et Pontijou. Un convoi de voitures en difficulté dans la boue et appartenant du 17ème Corps est inquiété à Maves par une colonne ennemie que deux escadrons de cavalerie repoussent. Dans la région de Villetrun, les éclaireurs arabes du colonel Goursaud tiennent tête aux Uhlans qui battent la campagne. Le 21ème Corps arrive péniblement à Autainville ayant mis cinq heures depuis Saint-Laurent-des-Bois pour effectuer six kilomètres à travers des terrains détrempés. Les restes du 75ème Mobile installent leur bivouac à Pontijou.

  1. de Marçay, sous-préfet de Vendôme, annonce qu’il va former une « Commission municipale » avec des conseillers désignés par lui ; la plupart se désistent. Il propose aux femmes de quitter la ville par le train et de se réfugier à Tours. Le maire est convoqué à la sous-préfecture pour participer à une conciliation par l’intermédiaire d’un aide de camp de Il est finalement convenu de télégraphier à Gambetta que le maire et les conseillers sont revenus sur leur décision de démissionner.

Mardi 13 décembre

Après quatre mois de siège, la ville de Phalsbourg, n’ayant plus de vivres, cède toute résistance. La garnison est faite prisonnière sauf les gardes mobiles mariés qui peuvent regagner leurs foyers. A Paris, il est décidé de rationner le pain.

La deuxième Armée de la Loire amorce sa retraite dans la neige et la boue, en premier les ambulances, puis les réserves d’artillerie et du génie. Le général Chanzy installe son quartier général à Vendôme avec la Division du général Barry à Saint-Amand, le 16ème Corps de l’amiral Jauréguiberry qui protège la ville en étant sur la rive gauche du Loir, le 17ème Corps entre Vendôme et Pezou, le 21ème Corps du général Jaurès de Pezou à Saint-Hilaire-la-Gravelle et enfin la Division de Bretagne du général Gougeard en protection vers Cloyes. Chanzy relate dans ses mémoires : « En s’établissant sur le Loir, on menaçait le flanc de l’ennemi descendant d’Orléans sur Tours, sans s’éloigner de Chartres sur lequel on pouvait déboucher par Châteaudun… pour reprendre les opérations vers Paris aussitôt qu’elles deviendraient possibles. »

La ville de Blois est occupée par le X° Corps allemand. Le 21ème Corps atteint Morée, puis Fréteval. Un pont en bois sépare les deux villages. On oublie de le détruire et de le garder si bien que les Prussiens passent tranquillement dans la nuit. Le 75ème Mobile arrive à Selommes dans un piteux état ; certains moblots marchent pieds nus.

A Vendôme où il fait deux degrés, c’est un va-et-vient continu dans tous les sens de voitures et de caissons conduits par des soldats en haillons. Les habitants ont du mal à croire qu’il s’agit de la victorieuse Armée de la Loire que les dépêches officielles leur décrivent. En soirée, Gambetta vient inspecter les positions du 17ème Corps à Saint-Ouen.

Mercredi 14 décembre

Sous l’effet de nouvelles pièces d’artillerie prussiennes, la ville de Montmédy (Meuse) capitule. Son commandant négocie un cessez-le-feu pour éviter la mutinerie de la garnison. Frédéric Charles ordonne au III° et X° Corps prussien de marcher sur Vendôme.

L’ennemi menaçant Fréteval, la Division du général Rousseau (21ème Corps) franchit le Loir à Saint-Hilaire-la-Gravelle et marche sur Morée en poursuivant le combat jusqu’à la nuit et en occupant le terrain ; l’ennemi recule.  A Fréteval, le général Guillon ne dispose que d’un bataillon de fusiliers-marins pour défendre le village. Accablés par le nombre, les marins sont refoulés ; toutefois les Mobiles de la Loire-Inférieure conservent la maitrise de la gare. Le général Jaurès ordonne une nouvelle attaque de nuit qui échoue. Pendant leur occupation de Fréteval, les Bavarois se livrent à des exactions et d’actes de cruautés en tuant des habitants. Le 75ème Mobile vient camper au lieu-dit Malignas, commune de Crucheray. Le dispositif mis en place par Chanzy résiste aux attaques de l’armée prussienne commandée par le prince Frédéric-Charles. Le général Barry dont la Division est située sur Saint-Amand, signale qu’une colonne ennemie essaie de le prendre à revers en passant par Château-Renault et en revenant sur Montoire.

Le bruit court au sein de l’Armée de la Loire que Chanzy aurait décidé de se replier sur Le Mans. Certains soldats en profitent pour quitter leurs unités, d’autres séparés de leurs Corps ne cherchent pas à les rejoindre et décident de se rendre au Mans. De ce fait ils deviennent déserteurs. Le plus grand désordre règne sur Vendôme et ses alentours.

Soixante ambulances avec des moblots de la Sarthe et de la Mayenne en retraite traversent Montoire avec toujours des fuyards mal-tenus. Le soir, des gardes nationaux de Blois fuyant l’ennemi viennent coucher pour repartir le lendemain sur Château-Renault. M. Prosper Sergent, conducteur réquisitionné tombe malade et rentre à Houssay sans son cheval et sa voiture.

Jeudi 15 décembre

Par décret à Paris, on réquisitionne tous les chevaux, les ânes et les mulets pour nourrir la population. Le général de Marivault réclame de nouveau l’évacuation du camp de Conlie et essuie un refus de la part de Gambetta. Le général Manteuffel s’approche du Havre et ses troupes occupent le département de l’Eure.

Au matin sous les balles ennemies, le général Jaurès réussit à faire brûler le pont en bois de Fréteval. A Pezou, le général de Jouffroy (17ème Corps) donne l’ordre de défendre le pont afin de le faire sauter ensuite ; trois compagnies restent en tirailleurs devant. Le 75ème Mobile forme les faisceaux à Villaria, commune de Naveil. Le 16ème Corps protège Vendôme avec la brigade du général Bourdillon sur le plateau du Temple ; elle est couverte par la colonne du général Camô en position sur Périgny, Villeromain et Crucheray et par les francs-tireurs de la Sarthe du commandant de Foudras.  La brigade du général Deplanque occupe les hauts de Montrieux. Les troupes du prince Frédéric-Charles n’entament pas les positions françaises malgré les batteries ennemies positionnées sur Sainte-Anne qui arrosent le plateau du Temple. Des colonnes ennemies se présentent sur Villetrun et Coulommiers-la-Tour. Chanzy demande à la Brigade du général Paris (17ème Corps) d’aller défendre les batteries françaises de Bel-Essort. Elle arrive trop tard. La retraite s’effectue par le pont de Meslay. L’aile droite française résiste comme la gauche, seul le centre recule et fragilise la défense de la ville.

Les habitants de Vendôme sont dans l’incertitude, il est question de combats sur Morée et Fréteval. En début d’après-midi, le bruit des canons et des mitrailleuses amplifie leurs inquiétudes. Le maire accompagné de quelques conseillers se rend à l’état-major de Chanzy pour demander l’autorisation de désarmer la garde nationale, ce qui leur est refusé. En fin d’après-midi, le conseil municipal vote le désarmement et reçoit l’accord du préfet du Loir-et-Cher. La retraite incessante de troupes revenant du champ de bataille par le faubourg Saint-Lubin augmente l’angoisse de la population. Une colonne de cavaliers prussiens traverse le village de Lancé (Loir-et-Cher).

Des moblots de la Charente-Inférieure et de la Dordogne arrivent à Montoire pour repartir le lendemain. Des combats sont annoncés sur Gombergean où Barry affronte le X° Corps allemand. La ville de Montoire se trouve plongée dans le cœur de la guerre, ce qui implique des combats et des représailles, des traînards et des maladies, des réfugiés et des blessés. La garde nationale se réunit pour décider de l’attitude à prendre en face de l’ennemi. L’ensemble des gardes se résout au désarmement craignant de ne pouvoir défendre la ville. Les armes sont cachées en lieu sûr afin de les soustraire à l’ennemi. M. Sergent d’Houssay envoie à Pezou un conducteur récupérer son cheval et sa voiture, l’avance des Prussiens l’empêche de les trouver.

Vendredi 16 décembre

Un combat a lieu à Longeau (Haute-Marne) où la garnison de Langres venue défendre ce village perd deux canons et cent cinquante soldats. Frédéric Charles donne l’ordre à son IX° Corps de traverser la Loire à Blois et de venir le rejoindre sur Vendôme au lieu de poursuivre sur Tours. Bourbaki retire ses troupes de Vierzon estimant que ses trois Corps d’Armée ne sont pas en état de porter secours à Chanzy et prend la direction de Bourges. Il lui est alors prescrit d’aller sur Nevers, de franchir la Loire et de suivre le cours du fleuve vers Briare et Gien pour gagner ensuite Montargis.

En fonction des succès de la veille, Chanzy est déterminé à poursuivre la résistance. A cinq heures du matin, l’amiral Jauréguiberry arrive à convaincre le général en chef de cesser toute résistance, le moral de son Corps d’Armée étant au plus bas. Chanzy donne l’ordre de battre en retraite sur Le Mans. Profitant du brouillard, la Deuxième Armée de la Loire quitte Vendôme, après avoir évacué des blessés, des approvisionnements et des munitions par le chemin de fer sur Tours. L’objectif est d’atteindre le soir la ligne Montoire, Epuisay, Mondoubleau, Saint-Agil.

Chanzy installe son quartier général à Epuisay. Dans la matinée, le général de Jouffroy fait détruire le pont de Pezou. Le 16ème Corps et la colonne Camô longent le Loir par la rive droite et se dirigent vers Mazangé, Montoire et Trôo. A midi des troupes du général Peytavin campent à Ris. Près de trente mille hommes en longues colonnes traversent Montoire. Le général Barry a pour instruction de passer le dernier. Sa Division vient de Saint-Amand-de-Vendôme via Villavard où une compagnie de Francs-tireurs veille sur les routes allant à Houssay et à Sasnières, car les éclaireurs de l’ennemi ne sont plus qu’à huit kilomètres. Barry a reçu l’ordre de faire sauter le pont de Montoire édifié depuis à peine un an et qui a coûté cent mille francs. Malgré la protestation des édiles, le pont doit être miné. Faute de poudre, l’espoir renaît de voir l’exécution abandonnée, mais l’explosif arrive de Vendôme. Le pont des Roches-l’Evêque est brûlé et ceux de Lavardin et de Trôo sont détruits dans la nuit.

Le 75ème Mobile franchit le Loir au milieu d’un encombrement de voitures, de caissons et de troupes diverses et prend la direction de Montoire. Formant l’extrême arrière-garde du 16ème Corps, il plante le soir ses tentes à Lunay ; son 3ème bataillon, constitué par des moblots du Maine-et-Loire, est rattaché à la 2ème Brigade du général Deplanque si bien qu’il ne compte plus guère que cinq cents soldats.

Le 17ème Corps traverse la forêt de Vendôme et prend la direction de Danzé, Azé et Epuisay.  Au 21ème Corps, le général Rousseau, n’ayant pas reçu l’ordre de retraite, est resté sur la rive gauche du Loir. Il cherche à conserver sa position au débouché de la route Orléans-Le Mans et s’apprête à occuper Morée quand il reçoit l’ordre de retraite ; à la nuit, il se replie sur Saint-Hilaire-la-Gravelle et passe le Loir pour rejoindre Saint-Calais (Sarthe). La Division bretonne du général Gougeard se retire vers Droué (Loir-et-Cher).

Les gardes nationaux de Vendôme rendent leurs armes place Saint-Martin. Les premiers Prussiens pénètrent en ville alors que les ponts sautent. Les dégâts étant insignifiants, cela leur permet de poursuivre les troupes françaises sur Saint-Ouen et la Tuilerie. Ils entreprennent les premières réquisitions et font une demande de quinze mille rations pour le lendemain. Les troupes logent chez l’habitant. Près de Villiers-sur-Loir, le 17ème Corps abandonne des voitures embourbées. Le maire, M. Fortier, ordonne de récupérer ce qu’elles peuvent contenir. L’une d’elles, celle du chef d’état-major, contient la caisse et les archives.  L’argent est déposé à la mairie, mais les archives sont oubliées ; elles tombent aux mains des Prussiens alors qu’elles comportaient des renseignements très importants.

Des artilleurs qui retraitent à Montoire, confirment, après avoir perdu une batterie et une mitrailleuse, que l’arrivée des Prussiens est imminente.

Samedi 17 décembre

Apprenant que Bourbaki allait faire mouvement sur Montargis, Moltke ordonne au général Zastrow de se porter depuis Châtillon-sur-Seine sur Auxerre pour le contrer. L’opération de diversion effectuée par Bourbaki sur Vierzon fait penser à Frédéric Charles qu’il risque d’être pris à revers si bien qu’il fait rétrograder ses III° et IX° Corps sur Orléans. Il laisse le soin au Grand-Duc de Mecklembourg avec son X° Corps de poursuivre Chanzy. Cela permet à ce dernier de continuer sa retraite sans trop de difficultés. Manteuffel quitte Rouen pour Amiens après avoir scindé son armée en deux, l’une opérant sur les rives de la Seine et l’autre sur les bords de la Somme.

Chanzy s’établit à Saint-Calais.  Tous les mouvements ordonnés aux Divisions de la deuxième Armée de la Loire sont en cours d’exécution. Alors qu’elle se reposait à Droué (Loir-et-Cher), la Division bretonne du général Gougeard est attaquée par les troupes du général Wittich. Revenu de sa surprise, Gougeard rétablit la situation et quitte Droué en début d’après-midi pour bivouaquer le soir à Saint-Agil (Loir-et-Cher). On déplore une perte d’une centaine d’hommes ainsi que du matériel abandonné.  A Épuisay, l’arrière-garde du 17ème Corps est accrochée par une reconnaissance ennemie qui n’insiste pas. Le 75ème Mobile a repris sa marche et traverse Savigny-sur-Braye (Loir-et-Cher) sans s’arrêter et le soir il campe à La Chapelle-Huon (Sarthe).

L’administration prussienne prend possession de la ville de Vendôme et organise les réquisitions auprès des commerçants. La population est sans nouvelles de Paris et Bordeaux et la rumeur se propage que les Prussiens occupent Tours. Les Allemands occupent Villiers-sur-Loir.

Après minuit une arche du pont de Montoire est détruite. Les maisons avoisinantes sont détériorées, vitres cassées, toits enfoncés par des projections de pierre. Aucun blessé n’est à déplorer. L’Armée s’est retirée et seuls quelques traînards démoralisés passent en ville. L’ennemi occupe Saint-Amand et il est signalé à Château-Renault. Les habitants s’inquiètent de le voir arriver. Le soir, des éclaireurs prussiens viennent par la route de Varennes jusqu’au pont des Roches-l’Evêque détruit et font demi-tour. Entre Saint-Rimay et Houssay, ils sont pris à partie par la garde nationale d’Houssay qui applique les consignes reçues début décembre en organisant une embuscade. Après des échanges de coups de fusil, trois cavaliers prussiens tombent de cheval dont deux sont grièvement blessés. Ils regagnent Vendôme.

Dimanche 18 décembre

Le roi de Prusse Guillaume 1er reçoit à Versailles une délégation du Reichtag de l’Allemagne du Nord. Le Général von Werder, à la tête d’une Division badoise, attaque la Division Cremer à Nuits-Saint-Georges (Côte-d’Or). Après un combat sanglant pour les deux parties, le général allemand s’empare de la ville qui est incendiée et pillée. La Brigade du général von der Goltz investit la ville de Langres et exige sa capitulation, sans succès, et installe des batteries pour en faire le siège.  A Paris, le général Trochu fait afficher une proclamation annonçant une prochaine attaque des assiégés prévenant ainsi l’ennemi… Au sujet du camp de Conlie, Gambetta revient sur sa décision et autorise l’évacuation à condition qu’elle se déroule avec sagesse et lenteur.

La Deuxième Armée de la Loire continue sa retraite vers Le Mans. Le quartier général cantonne à Ardenay-sur-Mérize (Sarthe). Le 21ème Corps tient la gauche du dispositif à Semur-en-Vallon et Saint-Maixent (Sarthe). Le 17ème Corps surveille la route Saint-Calais-Le Mans depuis Coudrecieux et Maisoncelles (Sarthe). Le 16ème Corps occupe une ligne de Tresson jusqu’à Saint-Georges-de-la-Couée où le 75ème Mobile bivouaque. Le général Barry est à Jupilles.

Des Uhlans défilent à Vendôme avec une musique en tête. Une messe est dite à La Trinité avec un sermon en allemand. Sur ordre des militaires, les rues sont nettoyées. Un convoi de cinq cents prisonniers est enfermé au quartier de cavalerie.

Les derniers traînards quittent Montoire. L’angoisse de voir des combats dans les rues, comme à Châteaudun, disparaît. Un détachement de Uhlans parvient à Lavardin après avoir faits prisonniers quelques soldats isolés. Un officier escorté de quelques cavaliers passe au gué de Lavardin et arrive à Montoire. Il fait demander le maire. M. Debourges et deux de ses adjoints MM. Diet et Busson vont à sa rencontre. L’officier leur fait connaître l’arrivée pour demain d’une armée prussienne de trente mille hommes environ et fait savoir que Montoire devra fournir des vivres et du fourrage. Il leur remet un ordre du jour ainsi rédigé :

Ordre du jour :

« Dans toutes les communes occupées par les troupes sous mes ordres, les hommes et le chevaux seront nourris par les habitants. On devra donner chaque jour :

  • Aux sous-officiers et aux soldats, à midi, une soupe, 500 grammes de viande ou de fromage. Le matin, du café avec du beurre ; chaque jour, un kilogramme de pain, 100 g de beurre.
  • Aux officiers : à midi un dîner composé d’une soupe, d’un plat de légume avec de la viande, du rôti et d’un litre de vin. Le matin, un déjeuner de café ou thé, avec du pain et du beurre. Le soir, un souper de thé », avec du pain, du beurre, et de la viande froide ou un plat chaud avec de la viande.
  • Pour chaque cheval, 6 kilogrammes d’avoine, 3 kilogrammes de paille et 3 kilogrammes de foin ;

Le général en chef : Signé de Voigts-Rhetz

Les Uhlans s’attablent à l’auberge du Bon Laboureur et consomment de l’eau-de-vie ; ils se retirent en payant. Dans la soirée le maire convoque le conseil municipal et les citoyens les plus imposés pour déterminer la position à prendre et les moyens pour livrer les fournitures. La nuit, un détachement prussien campe à proximité de Lavardin vers la route de Sasnières.

Lundi 19 décembre

En banlieue parisienne, des combats d’avant-postes se produisent à Montrouge et au Bourget. Désormais la nomination des commandants de la garde mobile sera désignée par décret du gouvernement au lieu d’être choisie par les soldats qui la composent. Le général de Marivault commence à évacuer le camp de Conlie. Le général von Werder décide de ramener sur Dijon les troupes qui occupent Nuits-Saint-Georges.

Alors que Bourbaki s’apprête à faire mouvement sur Montargis, M. de Freycinet lui adresse un nouveau plan de campagne. Il doit forcer l’ennemi à évacuer Dijon, Gray et Vesoul, puis débloquer Belfort et ensuite se porter sur Langres et couper les communications de l’ennemi avec le territoire allemand. Ce plan lui semble meilleur et il l’adopte. A la deuxième Armée de la Loire, Chanzy s’installe au Mans. Le 21ème Corps franchit l’Huisne à Connerré et à Pont-de-Gennes et s’établit à Monfort-le-Gesnois (Sarthe). Le 17ème élève des retranchements près d’Ardenay pour défendre la route du Mans à Vendôme. Le 16ème Corps se positionne à Parigné-l’Evêque où le 75ème Mobile campe dans une clairière entourée de sapins. Le général Barry, qui a récupéré les troupes de Morandy et des détachements du 15ème Corps, prend position sur une ligne de Château-du-Loir à La Chartre-sur-le-Loir et il est chargé de la protection de la ligne de chemin de fer du Mans à Tours. Il établit son quartier général à Chahaignes (Sarthe). La retraite s’est opérée avec difficultés à cause des intempéries, mais d’une manière assez calme en ce qui concerne les entreprises de l’ennemi atteint au moral et subissant comme les Français les fatigues des marches et des combats.

A Vendôme les réquisitions se poursuivent et posent de plus en plus de problèmes. Les morts à l’hôpital et aux ambulances sont si nombreux qu’on est obligé de creuser une fausse commune au cimetière. Le commandant de la place exige que les boutiques soient ouvertes et fait démurer les caves pour voir s’il n’y a pas des armes cachées. Les premières réquisitions et pillages se produisent à Villiers-sur-Loir.

L’unité prussienne annoncée la veille ne se présente pas à Montoire, mais se dirige depuis Vendôme sur Château-Renault et Tours. Il s’agit de la XIX° Division du général Schwartzkoppen du X° Corps qui a pour mission d’observer et de connaître l’importance des troupes stationnées à Tours. Ces Prussiens organisent des réquisitions sur Neuville-sur-Brenne et Château-Renault et rencontrent quelques détachements français qu’ils repoussent jusqu’à Notre-Dame-D’Oé (Indre-et-Loire).

Une centaine de fantassins prussiens en reconnaissance s’approche jusqu’aux Roches-l’Evêque et repart par Saint-Rimay et Villavard pour s’en retourner à Vendôme par Lavardin et la route de Saint-Amand. Seuls quelques cavaliers isolés font un tour à Montoire et rebroussent chemin.

Mardi 20 décembre

La Chambre de Hesse approuve les conventions passées avec la Confédération d’Allemagne du Nord. Cette dernière devient l’Empire allemand. Frédéric Charles installe son nouveau quartier général à Orléans. Un détachement prussien effectuant une reconnaissance se heurte à Querrieu et à Pont-Noyelles (Somme) sur les bords de l’Hallue à un avant-poste de l’Armée de Faidherbe. Trois compagnies du général Dufaure du Bessol se portent à son secours contraignant l’ennemi à se replier sur Amiens. Au siège de Paris, près de cents bataillons de gardes mobiles prennent position par le chemin de fer de ceinture depuis les bords de la Marne jusqu’à Saint-Denis. Dix-huit mille soldats stationnent encore à Conlie et le général de Marivault réclame son évacuation définitive ainsi que des armes. Les 18ème et 20ème Corps, sous les ordres de Bourbaki commencent leurs mouvements vers l’Est par chemin de fer sur Autun, Chagny et Châlons-sur-Saône. Le 15ème Corps reste en protection de Bourges.

Ses soldats ayant souffert du froid et subi des maladies, la Deuxième Armée de la Loire est dans un triste état ; elle est au repos devant Le Mans et commence à se reconstituer. Chanzy rétablit l’ordre dans ses troupes. Le 75ème Mobile s’installe près de la ville au lieu-dit le Chemin-aux-Bœufs. Au 1er Bataillon du Loir-et-Cher il ne reste que quatre cents hommes et au 2ème (les Montoiriens et les Vendômois) cent cinquante avec un total de huit officiers pour l’ensemble.

A l’approche de Tours, de violents combats opposent les Prussiens aux troupes du général Ferri-Pisani sur Monnaie, Parçay-Meslay et Saint-Symphorien. Six mille Français avec six canons font face à onze mille Allemands et vingt-quatre canons. Certaines unités françaises sont en rupture de munitions au bout de huit heures de combats. On compte soixante et onze morts dans nos rangs contre trente-huit ennemis. Au soir, l’ordre est donné de battre en retraite sur Langeais (Indre-et-Loire). Une escarmouche a lieu également à Vernou (Indre-et-Loire) avec des francs-tireurs aidés par la population. Une compagnie du LXXIX° Régiment d’infanterie prussien tombe sur un détachement de Mobiles qui se replie sur Tours. Un violent engagement s’ensuit au château de l’Orfraisière à Nouzilly (Indre-et-Loire.

Une grande opération consistant à démurer les caves à Vendôme est entreprise sur ordre de l’ennemi. De nombreux objets divers sont découverts ainsi que du fourrage et du vin distribué immédiatement aux soldats prussiens. Une musique militaire se produit place Saint-Martin sans attirer de spectateurs. De nombreuses voitures de réquisition en provenance des campagnes environnantes circulent en ville.

Deux Uhlans venant de Lavardin empruntent le chemin des Réclusages pour venir à Montoire en reconnaissance. Arrivés à Saint-Oustrille, ils constatent que le pont n’a pas été rétabli et repartent sans être menacés. Il y a des Prussiens tout autour de Montoire, dans les villages environnants réquisitionnant impitoyablement. Depuis plusieurs jours, les habitants font face à une épidémie de petite vérole. De jours en jours, la contagion s’intensifie et fait de nouvelles victimes.

Mercredi 21 décembre

La seconde chambre du Wurtemberg donne son approbation aux conventions signées avec la Confédération de l’Allemagne du Nord. Par une température de moins quatorze degrés, les troupes de l’amiral de La Roncière attaquent le Bourget. Après une lutte jusqu’à la fin du jour, elles se retirent sur leurs positions de départ.

En Indre-et-Loire, les Prussiens débouchent finalement aux portes de Tours sur la colline dominant le pont de la Loire, sur les quais de Saint-Symphorien et au pont de Saint-Cyr. Une canonnade est tirée sur la ville et des obus enfilant les rues font quelques victimes. Le drapeau parlementaire blanc est hissé par les autorités municipales.  Le maire, M. Eugène Goüin, vient demander la cessation des tirs de batterie, ce qui lui est accordé. Le général Voigts-Rhetz ordonne à ses troupes de revenir sur Monnaie (Indre-et-Loire). Ce dernier, considérant la faiblesse de ses forces, croit que l’armée de Bourbaki remonte vers Tours par la vallée du Cher. Il craint également que des renforts français arrivent du Mans par chemin de fer et fait couper la ligne à Mettray. Des Prussiens repassent par Vernou pour exercer des représailles. Comme le village ne peut payer la contribution requise, le chef de détachement désigne des notables comme otages et autorisent ses soldats à s’approprier leurs pantalons de meilleure qualité que les leurs. Les troupes de Voigts-Rhetz se retirent sur Orchaise et Blois. Cette avancée sur Tours décide Gambetta à rattacher à Chanzy la colonne de Ferri-Pisani retirée à Langeais et la Division du général de Curten en cours de formation à Poitiers.

Dans la matinée, trois lanciers français venant de Trôo poussent une pointe de reconnaissance sur le centre de Montoire, puis repartent. Une formation d’environ mille deux cents Allemands parvient de Vendôme par Varennes jusqu’aux Roches-l’Evêque. Ils rétablissent le pont. Apprenant la nouvelle, la foule qui se trouve au marché s’enfuit pressentant l’arrivée prochaine des Prussiens. En début d’après-midi, une dizaine de cuirassiers blancs de Koenisberg armes à la main entrent en ville au galop par la rue Saint-Denis et sillonnent les principales rues. Ils sont suivis par une colonne de fantassins qui se rangent sur la place. Des sous-officiers indiquent à la craie en face de chaque maison le nombre de soldats qui doivent être logés. Les officiers exigent de la municipalité le rétablissement du pont. Les ouvriers désignés rechignent, mais se mettent à poser un tablier en bois permettant le passage en voiture. Des sentinelles sont postées à chaque entrée de la ville empêchant les habitants de sortir s’ils ne sont pas munis d’un laissé-passez délivré par les officiers prussiens.

Les réquisitions prussiennes se poursuivent. Ils saisissent des vivres, des charrettes, des chevaux, des vaches, des moutons, du fourrage et de l’avoine à Houssay, à Lavardin, à Saint-Arnoult où le maire fait des difficultés ; les allemands expriment leur intention d’incendier sa maison et l’obligent à servir de guide jusqu’à Saint-Martin-des-Bois. Dans ce dernier village, un agriculteur qui s’oppose à la réquisition de ses bêtes est menacé d’être jeté dans un four.

Jeudi 22 décembre

Au siège de Paris, les Allemands bombardent le plateau d’Avron. Des combats d’avant-postes ont lieu à Maison Blanche et Clamart. Le capitaine de Boisdreffe s’envole à bord du ballon Lavoisier et atterrit dans le Maine-et-Loire. Cet officier est chargé d’avertir Chanzy que Paris ne pouvait résister que jusqu’à fin janvier.

Chanzy tient avant tout à refaire ses troupes. Il couvre son front par de nombreuses reconnaissances de cavalerie légère appuyées par des détachements de francs-tireurs. Celui du colonel Lipowski est envoyé vers Nogent-le-Rotrou (Eure-et-Loir) pour surveiller la direction de Chartres et celui du colonel Cathelineau va à Vibraye (Sarthe) pour observer la direction de Châteaudun. La petite colonne du colonel Villain occupe Connerré (Sarthe). Trois colonnes mobiles d’une force assez considérable se préparent à battre le pays : à l’aile droite le général   de Curten qui doit opérer sur Château-la-Vallière et Château-du-Loir, au centre le général de Jouffroy est chargé de marcher vers Château-Renault et Vendôme, à gauche le général Rousseau observera la vallée de l’Huisne jusqu’à Nogent-le-Rotrou en s’appuyant sur les détachements de francs-tireurs. Les troupes prussiennes demeurent tranquilles dans leurs cantonnements sur Vendôme. Elles surveillent le pays au moyen de détachements de cavalerie qui poussent parfois assez loin. C’est le cas ce jour à Sougé (Loir-et-Cher) où un avant-poste du général Barry refoule une reconnaissance ennemie.

Au matin, deux détachements prussiens partent de Montoire l’un en direction de Château-Renault, l’autre vers Trôo et Sougé. Les soldats restés en ville réclament « 200 bouteilles de vin bouché, 25 sacs de farine, plusieurs vaches, etc… ». Le premier détachement ramène des charrettes de fourrage, des chevaux, des vaches, des moutons sous la conduite de propriétaires réquisitionnés. Les communes soumises à réquisition sont Lavardin où ils enlèvent trente moutons et dix vaches, Saint-Arnoult où le maire, s’opposant à la mainmise, est menacé d’incendie et contraint de servir de guide pour aller à Saint-Martin-des-Bois. Dans ce village, les Prussiens se proposent de jeter un agriculteur dans un four parce qu’il refuse la réquisition de ses bêtes. Le deuxième détachement en reconnaissance le long du Loir est accueilli à Trôo par une fusillade tirée par des francs-tireurs postés dans le village. Le détachement poursuit sa route jusqu’à Sougé où il est stoppé et refoulé par des soldats de la Division Barry qui tuent et blessent quelques Allemands. A son retour à Montoire, l’officier qui commande le détachement annonce qu’il reviendra après Noël pour brûler Trôo et Sougé, ces villages recélant des francs-tireurs. Ne se trouvant pas en sûreté à Montoire, il décide vers trois heures de se replier au-delà du Loir. La cavalerie s’installe à Villavard et l’infanterie à Saint-Rimay. Les Prussiens se souviennent que le dix-sept décembre ils ont été pris à partie près d’ici et se vengent dans la nuit en pillant Saint-Rimay.

Vendredi 23 décembre

Le général Faidherbe attaque les troupes de Manteuffel à Pont-Noyelles (Somme). Son objectif est de reprendre le contrôle d’Amiens et de s’ouvrir une route vers Paris. Quarante mille français affrontent vingt-deux mille Prussiens. Le combat reste indécis sans résultat décisif. Les pertes françaises s’élèvent à cent quarante et un tués, neuf cents blessés et mille disparus. Les troupes parisiennes sont épuisées par les privations et le froid qui se maintient à moins dix degrés et empêche de terminer les travaux de tranchées le sol étant gelé. Parmi les soldats, on signale des cas de congélation.

Gambetta envoie ce jour une dépêche depuis Lyon au général Trochu, président du Gouvernement de Défense nationale et ministre de la guerre au siège de Paris : « … Chanzy, grâce à son admirable ténacité a fait lâcher prise aux Prussiens et, depuis le seize, il s’occupe à refaire ses troupes fatiguées par tant et de si honorables combats. Aussitôt remises, ce qui ne demande que quelques jours, rééquipées et munitionnées, vous pouvez être assuré que Chanzy reprendra l’offensive … ».

Chanzy donne ses instructions définitives pour l’installation de son armée autour du Mans. Le 21ème Corps est disposé entre les rives gauche de la Sarthe et de l’Huisne par Sargé-lès-Le Mans et Yvré-l’Evêque. Le 16ème Corps est placé en arc de cercle depuis Yvré-l’Evêque jusqu’à Arnage le long du chemin aux Bœufs défendant les routes du Grand-Lucé, d’Ecommoy et d’Angers. Le 17ème Corps s’installe à l’ouest du Mans entre les routes de Conlie et Laval. Les régiments de gendarmerie occupent Le Mans.  Une dépêche du général Chanzy adressée au ministère de l’Intérieur, datée de ce jour depuis Le Mans annonce : « Le général de Jouffroy d’Abbans est parti hier avec une colonne de gardes mobiles pour surprendre l’ennemi à Montoire… ». Ce dernier, commandant d’une Division d’infanterie reçut l’ordre de s’engager dans la vallée du Loir à partir d’Ecommoy (Sarthe) avec l’appui de deux cents chevaux de cavalerie légère, trois batteries d’artillerie, deux mitrailleuses et de plusieurs compagnies de francs-tireurs. Les soldats ont trois jours de vivres.

Des voitures chargées de fourrage encombrent les rues de Vendôme, bien souvent conduites par des Montoiriens réquisitionnés qui racontent que des escarmouches entre les deux armées ont lieu dans le Bas-Vendômois. Au cimetière des cadavres s’entassent au lieu d’être ensevelis. Les prisonniers français parqués au quartier quittent la ville.

La cavalerie ennemie stationnée à Villavard et l’infanterie basée à Saint-Rimay s’en retournent à Vendôme. Les habitants de Montoire sont sans nouvelles de ce qui se passe autour de leur ville. Quelques Montoiriens se rendent à Vendôme pour obtenir des nouvelles.

Samedi 24 décembre

Un engagement a lieu à Bolbec (Seine-Inférieure) où les francs-tireurs d’Elbeuf et les mobilisés du Havre ont une conduite admirable. En banlieue de Paris, deux bataillons de la garde nationale effectuent une reconnaissance sur le Raincy. Les batteries des forts de Bondy et du plateau d’Avron tirent sur les travaux de retranchements des Prussiens. Les troupes du général Faidherbe battent en retraite. Des membres du Gouvernement critiquent l’action militaire du général Trochu et décident de le convoquer.

A Vendôme de nombreuses troupes prussiennes quittent la vile ce qui n’empêche pas les réquisitions de se poursuivre dans la campagne vendômoise. Les Allemands observent une trêve tacite pendant deux jours. Le général Voigts-Rhetz décide de fêter Noël à Blois fastueusement avec son état-major.

Vers onze heures du matin, une soixantaine d’Uhlans arrivent à Montoire et font halte sur la place. Près de la maison de M. Marin, horloger, un soldat fait partir un coup de feu par maladresse et reçoit une correction de la part de son officier. A deux heures, un Uhlan appartenant à un groupe de reconnaissance parti sur Trôo revient avec son cheval blessé au pied par balle. Il vient d’essuyer des coups de feu vers Trôo de la part de francs-tireurs. L’officier, responsable du détachement, déclare qu’ils reviendront lundi se venger de cette attaque, précisant que Montoire ne serait pas épargné.

Dimanche 25 décembre

Gambetta prononce la dissolution des conseils généraux élus en août apprenant que Napoléon III projetait de les réunir dans une ville du Midi pour reconstituer une Assemblée nationale. A Paris, il est difficile se chauffer, car le bois manque.

Pour fêter Noël, deux escadrons prussiens, précédés d’une musique, quittent Vendôme et défilent à travers Montrieux et Villiers-sur-Loir jusqu’aux hauteurs de Mazangé. Après avoir tiré un coup de canon, ils reviennent à Vendôme.

La messe de minuit n’est pas célébrée à Montoire, les cloches n’étant plus actionnées. Avant la fin de la grand’messe du matin, la nouvelle qu’une cinquantaine de Uhlans vient d’arriver sur la place, se propage dans l’église. Les fidèles s’éclipsent avant la fin de l’office. Les cavaliers annoncent l’arrivée pour demain d’une troupe de trois mille hommes et disent reporter leur action sur Trôo et Sougé à demain parce que c’est Noël. Ce n’est pas le cas à Saint-Calais (Sarthe) où huit cents Prussiens venant d’Epuisay pillent la ville et obtiennent une rançon de quinze mille francs après en avoir demandé vingt mille. Puis ils se retirent sur leur camp de base à Galette.

Lundi 26 décembre

Trois bataillons de la garde nationale de Paris occupent le parc de Maison Blanche à Neuilly-sur-Marne. Ils renversent et abattent le mur crénelé gardé par des soldats saxons. Le général Trochu rend compte de son action aux membres du gouvernement et demande à être remplacé. Finalement et à l’unanimité il est décidé que le commandement en chef ne lui sera pas enlevé.

Le XVII° régiment d’infanterie prussien du colonel von Ehrenberg, chargé de détruite le viaduc de Villedômer (ligne Paris-Tours via Vendôme), se heurte à Auzouer-en-Touraine à la 2ème compagnie des francs-tireurs de Tours. Après avoir fait sauter l’ouvrage, les Allemands se retirent sur Dame-Marie-les-Bois ou au passage ils réquisitionnent un troupeau de moutons. La ligne de chemin de fer Le Mans-Tours est rétablie et elle est protégée par les troupes des généraux de Curten et Cléret, ce dernier remplaçant le général Ferri-Pisani. Ces deux unités avaient pour mission d’interdire à l’ennemi de venir attaquer l’aile droite de la Deuxième Armée de la Loire en occupant le secteur de Château-la-Vallière.

Un important détachement prussien composé de deux compagnies du LXXIX° Régiment d’infanterie prussien, d’un bataillon de fusiliers, d’un escadron du régiment des Uhlans, de deux pièces de canon de la IV° batterie légère, des voitures et des ambulances, s’est mis en route depuis Vendôme. Il encercle le bois de la Saulnerie près de Houssay d’où étaient partis les tirs du 17 décembre blessant quelques cavaliers prussiens. Ils arrêtent onze paysans et continuent sur Saint-Rimay où, malgré les supplications des femmes, ils font dix-huit prisonniers dont une femme et deux enfants. Vers le début de l’après-midi, ils pénètrent dans Montoire. Les otages sont enfermés dans la caserne sans nourriture. MM. Debourges et Busson, le maire et l’adjoint interviennent auprès du lieutenant-colonel Boltenstern, chef du détachement, pour les libérer ; ils n’obtiennent que l’autorisation de leur apporter de la nourriture. Devant les suppliques des prisonniers, les deux édiles refont une nouvelle démarche et le commandant prussien promet de les libérer le lendemain. Par des avis répandus en ville, les habitants sont priés de déposer leurs armes à la mairie ; personne ne s’y rend, car les armes ont été cachées. Le détachement reste coucher à Montoire.

Chanzy envoie un parlementaire porter une lettre de réprobation au commandant en chef de Vendôme concernant le saccage de Saint-Calais :

« J’apprends que des violences inqualifiables ont été exercées par les troupes sous vos ordres, sur la population inoffensive de Saint-Calais, malgré ses bons traitements pour vos malades et vos blessés.

Vos officiers ont exigé de l’argent et autorisé le pillage ; c’est un abus de la force qui pèsera sur vos consciences et que le patriotisme de nos populations saura supporter. Mais ce que je ne puis admettre, c’est que vous ajoutiez à cela l’injure, alors que vous savez qu’elle est gratuite.

Vous avez prétendu que nous étions les vaincus : cela est faux. Nous vous avons battu et tenu en échec depuis le quatre de ce mois. Vous avez osé traiter de lâches des gens qui ne pouvaient vous répondre, prétendant qu’ils subissaient la volonté du gouvernement de la défense nationale, les obligeant à résister, alors qu’ils voulaient la paix et que vous la leur offriez.

Je proteste avec le droit que me donne de vous parler ainsi, la résistance de la France entière et celle que l’armée vous oppose et que vous n’avez pu vaincre jusqu’ici.

Cette communication a pour but d’affirmer de nouveau ce que cette résistance vous a déjà appris. Nous lutterons avec la conscience du droit et la volonté de triompher, quels que soient les sacrifices qu’il nous reste à faire. Nous lutterons à outrance, sans trêve ni merci, parce qu’il s’agit aujourd’hui de combattre, non plus des ennemis loyaux, mais des hordes de dévastateurs qui ne veulent que la ruine et la honte d’une nation qui prétend conserver son honneur, son indépendance et son rang.

A la générosité avec laquelle nous traitons vos prisonniers et vos blessés, vous répondez par l’insolence, l’incendie et le pillage.

Je proteste avec indignation, au nom de l’humanité et du droit des gens que vous foulez aux pieds.

Le présent ordre sera lu aux troupes à trois appels.

Au quartier général du Mans, le 26 décembre 1870

Le général en chef : Chanzy ».

Le major Koeber, chef du détachement sur Saint-Calais accuse réception de la lettre accompagnée de ces mots : « Un général prussien ne sachant pas écrire une lettre d’un tel genre, ne saurait y faire une réponse par écrit ».

Mardi 27 décembre

Des batteries prussiennes bombardent les forts de Noisy, de Nogent-sur-Marne et le plateau d’Avron. Cette canonnade est le prélude d’un bombardement total sur Paris. Une reconnaissance française sur les bas de Meudon repousse l’ennemi sur les hauts de Meudon. Dix mille fusils Springfield sont livrés au camp de Conlie, mais sont laissés en caisse de peur qu’ils rouillent.

Il neige sur Vendôme sans discontinuer. La variole fait des progrès ; on compte en deux jours quarante- huit inhumations au cimetière.

A Montoire, contrairement à sa promesse de la veille, le lieutenant-colonel Boltenstern ne libère pas les prisonniers à l’exception d’une femme et ses enfants. Tôt le matin, il envoie un groupe de Uhlans en reconnaissance sur la route de Savigny qui surprend et enlève à la ferme de la Touche des Bois des éclaireurs de la Division Jouffroy. Craignant la présence d’autres troupes françaises, il décide de partir en direction de Trôo et Sougé. Il laisse en arrière une compagnie pour garder le pont des Roches-l’Evêque et deux autres pour occuper Montoire. Le groupe de reconnaissance a pour mission de se renseigner sur les mouvements des troupes françaises et également de se venger des francs-tireurs et des gardes nationaux de Trôo et Sougé qui les ont mitraillés quelques jours auparavant. Au passage à Saint-Quentin-lès-Trôo, il positionne une partie de son artillerie à la ferme de la Lunoterie près de Chalais. L’avant-garde atteint à peine Trôo qu’elle est accueillie par des coups de fusil provenant des maisons et se trouve face à des tirailleurs de l’avant-garde de la colonne Jouffroy. Elle peut néanmoins les refouler et poursuivre sa route vers Sougé en laissant deux compagnies à Trôo. Ces dernières prennent des otages civils, incendient dans la rue Basse la maison de M. Guillon-Fagu et mettent le feu avec du fourrage dans deux caves pour étouffer les habitants qui s’y sont réfugiés. Près de Sougé, une vive fusillade surprend les Allemands et malgré l’appui de deux pièces de canon ils doivent se replier sans délai ; sur les hauteurs du nord, dans la direction de l’ouest, se montrent de nombreuses troupes françaises et apparaissent sur les crêtes des batteries balayant toute la rive droite du Loir. La retraite devient une nécessité et le lieutenant-colonel Boltenstern, qui dirige la reconnaissance, en donne l’ordre.

En effet, la colonne Jouffroy a atteint Bessé-sur-Braye et Lavenay et se dispose à se diriger vers Vendôme, quand le général apprend qu’un détachement ennemi descend le Loir sur son flanc droit et marche vers Pont-de-Braye. Arrivé à Fontaine-en-Beauce, Jouffroy divise ses troupes en trois groupes. Le premier composé du 1er Bataillon de Chasseurs à pied et d’un Bataillon du 45ème Régiment de Marche prend la direction des Roches-l’Evêque ; le deuxième formé par le 1er Bataillon du 70ème Mobile du Lot et d’une batterie avance vers Trôo ; le troisième, sous les ordres de Jouffroy, est constitué de deux Bataillons du 45ème de Marche, d’une batterie et de deux mitrailleuses. Ce dernier se porte sur Montoire et prend position au débouché de la vallée de Fontaine vers le Loir. Les deux autres Bataillons du 70ème Mobile s’établissent en réserve sur le plateau au nord de Saint-Quentin-lès-Trôo.

Depuis Sougé, les Prussiens, talonnés par les Français, rétrogradent vers Trôo et Saint-Quentin. ; arrivés sur ce dernier village, ils enlèvent d’autres otages et fusillent M. Domet-Anjoubault, habitant de Trôo âgé de 72 ans, qui vient de tenter de s’évader. Mais en débouchant dans la plaine de Saint-Quentin, ils s’aperçoivent que leur route est barrée par des lignes de tirailleurs qui occupent le versant du coteau et la vallée menant à Fontaine. Des canons sont en position sur les hauteurs au lieu-dit La Place au-dessus de la maison de Madame du Bezin, d’autres canons sont à la Haloperie, dont deux en bas du coteau. L’artillerie prussienne s’établit sur la route auprès d’une ferme non loin de Chalais. La grange de cette ferme est incendiée par les obus français. Les canons ennemis répliquent, mettent le feu à une maison près de la Fosse et arrosent d’obus les tirailleurs en ligne causant des pertes importantes. Mais les canons français répondent et prennent en flanc les Prussiens. Une charge violente des cavaliers Uhlans parvient jusqu’au général Jouffroy l’obligeant de se défendre avec son revolver et à se replier légèrement vers Fontaine. Le combat dure près deux heures.

La colonne du 70ème Mobile trouve Trôo abandonné par l’ennemi et se met en place avec six canons près d’une ferme à l’est des Ruaux. Les 2ème et 3ème Bataillon du Lot en réserve descendent dans la plaine. Boltenstern, enserré à droite par le Loir et par des forces ennemies établies tant en face de lui que sur sa gauche et à revers, se sent désormais contraint, soit de mettre bas les armes, soit de s’ouvrir un passage par la force. La position de ses troupes semble désespérée.  Il place trois compagnies avec ses pièces face aux tirailleurs français, range ses fourgons sur deux rangs et met une compagnie en arrière-garde avec des cavaliers sur les ailes. Après avoir préparé par le feu de ses deux pièces sa tentative d’ouverture qui est sa dernière chance, il lance à la baïonnette et sans tirer les cinq compagnies qui lui restent contre la droite française. Une mêlée furieuse s’en suit, au milieu de laquelle l’artillerie française fait pleuvoir ses obus au hasard. Les compagnies du 45ème de Marche se battent avec acharnement ; mais très éprouvées par les obus prussiens au début du combat, elles cèdent du terrain. Les Prussiens réussissent à faire une brèche étroite dans les rangs français et y passent en trombe au pas de course vers Montoire. Leurs deux pièces réattelées rapidement dans une ferme avec quatre chevaux suivent au galop la retraite des fantassins prussiens non sans avoir encore perdu deux chevaux qu’ils détèlent sous la mitraille. A quatre heures et demi, les Prussiens se retirent par le faubourg Prazay. Au cours du combat sur Saint-Quentin, le presbytère, des bâtiments et plusieurs maisons furent endommagées par les obus.

C’est vers une heure de l’après-midi que les Montoiriens entendent des détonations vers Saint-Quentin, mais suffisamment près de la ville pour faire vibrer les vitres. Des projectiles viennent détériorer des maisons et des toits, comme une grange aux Patis et la maison de M. Chateignier, horloger au coin de la place et de la rue Saint-Laurent. Plusieurs habitants pensant à un bombardement de la ville se réfugient dans les caves des coteaux avec leurs enfants et leurs richesses. Les deux compagnies prussiennes gardant Montoire s’inquiètent et se replient avec leur matériel dans le faubourg Saint-Oustrille, puis reviennent sur la place pour se diriger sur Lavardin par la rue Saint-Laurent pour finalement faire demi-tour. La rumeur se répand que les Prussiens sont encerclés. Vers quatre heures, la canonnade s’arrête et les troupes ennemies parviennent en ville avec leurs deux canons et les prisonniers civils et les soixante éclaireurs français faits prisonniers le matin. Les Prussiens positionnent leurs deux canons dans la rue Saint-Jacques. Des habitants les observent par curiosité et sont faits prisonniers. C’est le cas de MM. Guiochain, propriétaire, David, facteur, Roulleau, marchand épicier, Perré, coutelier et Gautier, cafetier. A cinq heures, l’ordre de marche est donné par le lieutenant-colonel Boltenstern.  Les deux compagnies laissées à Montoire couvrent la retraite par la rue Ronsard. Une fois le pont franchi, les uns s’enfuient avec les fourgons et les prisonniers civils et militaires par le chemin des Réclusages vers Lavardin tout en prenant d’autres otages au quartier Saint-Oustrille pour leur servir de guide et de protection, les autres par la route de Château-Renault pour dissimuler la fuite des premiers.

Les habitants de Villavard remarquent vers deux heures de l’après-midi que le bruit des canons se rapproche de chez eux. Ils montent sur les hauteurs du village pour apercevoir les bataillons envoyés par Jouffroy sur les Roches qui descendent le coteau et capturent la compagnie prussienne chargée de garder le village.  Ce détachement envoie une reconnaissance vers Fortan et intercepte un officier allemand et dix hommes en train de réquisitionner les villageois.

Une demi-heure après le départ de Montoire des Prussiens, les soldats du 70ème Mobile du Lot pénètrent dans la ville au pas de charge au grand bonheur des habitants qui assistent à un succès français. Sous le commandement du capitaine Pechverty, les moblots se lancent à la poursuite de l’ennemi par le pont vers Château-Renault.  Au bout de trois kilomètres, ils arrêtent deux caissons et sept voitures avec leurs trente occupants. La nuit tombante, ils interrompent leur traque.  Plus tard, près des Réclusages, le lieutenant-colonel Delgal et ses moblots rencontrent des Prussiens dont les fourgons sont embourbés ; une fusillade se déclenche, des ennemis sont tués, le reste est capturé. Les moblots ramènent douze charriots remplis de victuailles et de diverses marchandises pillées ainsi que des ambulances occupées par des blessés et des morts. La Mobile du Lot passe la nuit à Montoire logée chez l’habitant.

En se repliant sur Lavardin, les Prussiens furieux font prisonniers tous les civils qu’ils rencontrent. Madame Joubert, ses deux enfants et sa domestique, demeurant rue Saint-Laurent, traversent le Loir pour passer aux Réclusages et se réfugier à Lavardin, aidé de l’instituteur de Lavardin qui revient de Montoire pour rentrer chez lui. Malchanceux, ils sont interceptés par la colonne prussienne et obligés de marcher avec elle. Un mendiant est même enlevé et dépouillé de son pain. Un facteur, de retour de Villavard, refuse de les suivre en se jetant à terre ; il est frappé à coups de bottes et de crosses, faisant le mort, il est abandonné sur la route. Une fois les Prussiens éloignés, il rejoint Montoire. Au bout de huit kilomètres, Madame Joubert, ses enfants et sa domestique sont renvoyées. La colonne de fuyards prussiens se dirige sur Saint-Amand-de-Vendôme avec l’intention de bifurquer ensuite sur Vendôme. Pour se protéger, ils avancent avec des otages aux premiers rangs et d’autre otages dans les derniers rangs. A Ambloy, M. Domet-Girault, un prisonnier de Trôo, très âgé et chaussé de sabots ne peut plus suivre. Il est fusillé et son corps laissé sur le bord de la route.

Succès prometteur, mais de courte durée, le bilan du combat de Saint-Quentin-lès-Trôo est le suivant : les Prussiens annoncent avoir fait prisonniers dix officiers, deux cent trente-quatre hommes de troupe et deux cents otages civils Ils évaluent leurs pertes en tués, blessés et prisonniers à cent hommes environ. Les Français comptent dix-huit tués dont un officier et disent avoir capturé une centaine de Prussiens. Trois soldats français ont été enterrés au cimetière de Saint-Quentin ainsi que trois Prussiens, les autres l’ont été à Fontaine-en-Beauce. Les Prussiens estiment les pertes françaises à deux cents hommes.

Mercredi 28 décembre

Au siège de Paris, les Allemands poursuivent leurs bombardements sur le plateau d’Avron d’où il est décidé de retirer soixante-quatorze pièces d’artillerie. Vingt mille soldats allemands occupent Saint-Quentin (Aisne). A Longpré-les-Corps-Saints (Somme), deux mille Prussiens combattent cinq cents mobilisés du Nord et six cents Mobiles du Pas-de-Calais. Armés de vieux fusils, les Français succombent sous le nombre.  Huit morts, quinze blessés et cent cinquante prisonniers français sont à déplorer ainsi que vingt-deux otages civils qui sont libérés par le curé après une difficile négociation.

Les Vendômois apprennent qu’un combat a eu lieu à Montoire et que les Prussiens ont eu des pertes sensibles. Un parlementaire français rend visite au général commandant la ville. On signale de nombreuses mises à sac de maisons de particuliers. Un convoi d’otages militaires et civils se dirige vers Blois alors que des prisonniers ont réussi à s’évader avec la complicité des habitants.

Une avant-garde de la Division Jouffroy, forte de quatre-vingt hommes, vient occuper les hauts de Saint-André et le Gué -du-Loir, commune de Mazangé. Elle s’accroche avec une reconnaissance de cinq Uhlans qui se retirent sur Vendôme avec un tué et un blessé. En représailles, un détachement du LXXIX° Régiment hanovrien entre dans le village et capture les seize premiers habitants rencontrés. Leur chef exige toutes les armes de la commune et pose une réquisition immédiate de vingt-quatre sacs d’avoine. Dans l’impossibilité de satisfaire la réclamation, le maire, M. Fortier, est fouetté jusqu’au sang. Les Hanovriens engagent une fusillade avec les français restés au Gué-du-Loir qui se replient vers Montoire.

Après cette courte victoire, le général Chanzy donne l’ordre à Jouffroy de poursuivre son mouvement en avant : « je vous félicite sur le résultat obtenu hier. Continuez à poursuivre l’ennemi, soit sur Vendôme, soit sur Château-Renault ». Les troupes du général Jouffroy occupent le village et les crêtes du coteau des Roches-l’Evêque. Un petit détachement prussien tente une attaque vers elles, puis renonce et s’évanouit vers Vendôme. De leur côté les moblots du Lot lancent une reconnaissance vers Château-Renault sans rencontrer l’ennemi qui s’est retiré sur Vendôme via Saint-Amand. Le soir, ce sont quatre mille soldats qui stationnent à Montoire et doivent repartir demain matin.

Jeudi 29 décembre

Dans l’est parisien, les tirs de l’ennemi passent au-dessus du plateau d’Avron et atteignent les voies de communications et les villages environnants. Les Prussiens entreprennent le siège de Péronne (Somme).

Suite à un manque de wagons, à la désorganisation des compagnies ferroviaires et aux intempéries, l’Armée de Bourbaki ne fait que d’arriver à Autun et à Chalon-sur-Saône.

Des Prussiens s’avancent jusqu’à Mazangé vandalisant les écoles et la mairie, puis regagnent Vendôme. Les Mobiles du Lot viennent occuper Le Gué-du-Loir tandis que le 46ème Régiment de Marche prend position en soirée à Lunay, Fortan et Mazangé. Douze Uhlans, réquisitionnant des vaches sont arrêtés à Lunay. Le général de Curten reçoit l’ordre de prendre Château-Renault.

A Vendôme, une réquisition de huit voitures est demandée par les Allemands afin de transférer demain à Blois leurs blessés et leurs malades. Les Prussiens ayant découvert des armes oubliées dans la gendarmerie, le maire, M. Moisson, est emprisonné. Le Conseil municipal délibère sur la manière de délivrer le maire.

Vendredi 30 décembre

Les Parisiens continuent de souffrir du froid et du rationnement. Victor Hugo écrit : « Ce n’est même plus du cheval que nous mangeons. C’est peut-être du chien ? C’est peut-être du rat ? Je commence à avoir des maux d’estomac. Nous mangeons de l’inconnu ». Les denrées alimentaires ne cessent d’augmenter. Un chat vaut vingt francs, un corbeau cinq francs et un rat trois francs. Au camp de Conlie, de Marivault fait encore partir six mille hommes et conserve six bataillons d’Ille-et-Vilaine.

Un bataillon du 46ème de Marche pénètre dans Villiers et fait reculer les Prussiens. Neuf cent cavaliers algériens sous les ordres du colonel Goursaud prennent garnison à Montoire. Jouffroy reçoit des renforts de la part du général Barry en provenance de La Chartre-sur-le-Loir. Il s’agit du 66ème Mobile.

Samedi 31 décembre

Les Prussiens augmentent le nombre de leurs batteries de gros calibre et le bombardement de l’est parisien s’intensifie. A Moulineaux et Grand-Couronne (Seine-Inférieure), les Mobiles de l’Eure et de l’Ardèche, sous les ordres du général Roy, chassent les Prussiens des collines de la rive gauche de la Seine.  Ces derniers engagent leurs troupes de réserve et, poursuivant les moblots, ils leur font subir de lourdes pertes.

Un détachement de la Division Rousseau évolue depuis Mondoubleau sur Courtalain (Eure-et-Loir) et surprend une colonne allemande qui s’enfuit abandonnant soixante morts pour un mort et six blessés français. Le général de Curten occupe Château-Renault avec le 4ème Bataillon des Mobiles de la Mayenne en grand’garde à Saunay (Indre-et-Loire).

Jouffroy décide d’attaquer le X° Corps prussien commandé par le général von Kaatz-Kosclau. Un détachement léger franchit le Loir en amont pour contourner Vendôme et prendre Meslay. Le 66ème Mobile refoule une colonne ennemie à la Tuilerie. La troupe du colonel Courty enlève Bel Air.  Le 46ème de Marche attaque sur Montrieux faisant vingt-neuf prisonniers et trente hommes hors de combat dans les rangs prussiens. Il poursuit sur sa lancée, arrive aux portes de Vendôme et occupe quelques instants la gare sans pénétrer dans la ville. Sur la rive gauche du Loir, les éclaireurs algériens du colonel Goursaud sont chargés d’aller couper la route de Blois. Après avoir tué quelques cavaliers prussiens à Villaria, ils sont menacés par l’artillerie ennemie. S’apercevant qu’ils ont des cavaliers prussiens sur leur flanc, ils opèrent leur retraite sur Villavard. Au nord-ouest, le colonel Thierry marche sur Epuisay et Danzé. Il se fait repousser jusqu’à Bel Air par une violente offensive. Jouffroy, inquiet de ce recul, croit à un mouvement sérieux sur son aile gauche et ordonne la retraite sur les positions de départ.

En fin de matinée, les Vendômois entendent les fusillades et les canonnades dans toutes les directions. Les troupes prussiennes quittent la ville pour aller combattre. Dans l’après-midi, de nombreux blessés prussiens sont ramenés dans des ambulances et même dans des voitures à bras. Les habitants ignorent l’issue des combats et espèrent qu’ils seront débarrassés des Prussiens en soirée.  Les Montoiriens entendent le son des canons en direction de Vendôme.

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