Cette chronologie reprend les principaux faits nationaux intégrés aux événements du Centre Val de Loire et plus particulièrement du Vendômois…
Mois de Novembre 1870
Mardi 1er novembre
Bismarck et Thiers poursuivent leurs entretiens à Versailles au sujet des conditions d’armistice. Le général Aurelle de Paladines vient visiter le 16ème Corps en forêt de Marchenoir. L’Armée de la Loire est complétement organisée. Gambetta et la délégation de Tours préparent une offensive, ce qui occasionne des mouvements de troupes dans le Loir-et-Cher et plus principalement sur le Vendômois.
Mr. de Marçay, sous-préfet de Vendôme, demande des volontaires parmi la garde nationale pour effectuer une expédition sur Pezou. Le départ des mobiles de Haute-Loire est annoncé. Une grande agitation règne en ville.
Une rumeur court dans Montoire qu’une dépêche importante n’a pas été publiée ; la foule se rassemble devant le bureau du télégraphe et devant la mairie. Il s’avère que cette dépêche ne concerne pas la guerre.
Mercredi 2 novembre
Pour une raison de santé, le général Pourcet est remplacé par le général Chanzy au commandement du 16ème Corps. Le contre-amiral Jauréguiberry prend la place de ce dernier à la tête de la 1ère Division de ce même Corps. Gambetta et la délégation de Tours proclament la levée en masse et la mobilisation des hommes valides de vingt et un à quarante ans.
Le commandant Lacordaire est nommé colonel de la garde nationale du Loir-et-Cher. Mr. Brizard, le nouveau procureur de la République, s’installe à Vendôme. Les deux cents volontaires reviennent de Pezou sans avoir rencontré un seul Prussien, mais en ayant effrayé les habitants. Deux francs-tireurs de la Sarthe, Raimbourg et Dieumegarde, sont traduits devant une cour martiale pour des fautes légères. Ils sont finalement acquittés et mutés dans une autre unité. Cent cinquante francs-tireurs du Loir-et-Cher arrivent en ville.
Jeudi 3 novembre
L’Armée du Prussien von Werder encercle les alentours de Belfort. Les troupes badoises investissent Dijon dont le préfet est fait prisonnier et chassent quelques éléments de l’Armée de Garibaldi qui s’y trouvaient. Au siège de Paris, des combats se poursuivent en avant du fort de Nogent. Le 16ème Corps de l’Armée de la Loire occupe la ligne Cloyes, Morée, Fréteval, Marchenoir.
Après les troubles du 31 octobre à Paris, un plébiscite pour ou contre le maintien du gouvernement de défense est organisé auprès de la population parisienne. Le résultat donne 557.976 oui contre 68.368 non et laisse espérer qu’un armistice de vingt-cinq jours est possible pour élire une nouvelle Assemblée nationale.
L’artillerie et le génie continuent sous la pluie les travaux de défense de Vendôme, traversée par les colonnes de civils qui fuient l’Armée prussienne. Le peintre Gervais Launay rencontre Mr. de Galembert qui apporte aux habitants de Châteaudun un montant de cinq mille francs et vingt-cinq colis de vivres et vêtements.
Vendredi 4 novembre
Les troubles, réclamant la poursuite de la guerre, qui se sont produits à Paris, empêchent les tractations d’armistice et de paix de se poursuivre à Versailles. Le 4ème bataillon des mobiles de Maine-et-Loire quitte Mer pour Marchenoir et il est rattaché à la 1ère brigade, de la 1ère Division du 16ème Corps.
On constate une forte affluence et de nombreuses transactions au marché de Vendôme où les fournisseurs de l’armée s’approvisionnent. Le maire de Cloyes décide de désarmer sa garde nationale sédentaire. Le commandant Foudras, chef des francs-tireurs de la Sarthe, lui ordonne le réarmement en placardant dans sa ville une dépêche de Gambetta et en occupant la route de Vendôme à Cloyes à l’aide des mobiles du Gers et des francs-tireurs des Hautes-Pyrénées. Le départ des mobiles de Haute-Loire est encore ajourné.
Samedi 5 novembre
Un détachement badois sort de Dijon en direction de Saint-Jean-de-Losne (Côte-d’Or). Il se heurte à Brazey-en-Plaine (Côte-d’Or) à un groupe de l’Armée de Garibaldi composé des francs-tireurs du Vaucluse, d’Eclaireurs du Rhône et une compagnie des volontaires d’Oran. Le chef de détachement ennemi, le major Saint-Ange, essaye de contourner les Garibaldiens, mais ses soldats hésitent, il se met à leur tête et il est tué. Le groupe ennemi s’enfuit vers Dijon. Le 1er Corps d’Armée de von der Thann fait mouvement pour occuper la route d’Orléans à Châteaudun.
A Paris, les résultats favorables du plébiscite poussent le Gouvernement provisoire à organier l’élection d’un maire par arrondissement. Le Comte de Chambord fait une proclamation incitant les Français à se consacrer au salut de la France.
Le 70ème Mobile du Lot arrive à Vendôme au quartier de cavalerie en vue d’être intégré dans le 17ème Corps en cours de formation.
Dimanche 6 novembre
Les pourparlers d’armistice entre Thiers et Bismarck sont rompus. Le commandant Foudras des francs-tireurs de la Sarthe est relevé de son commandement pour avoir refusé d’organiser une battue afin de découvrir l’origine de signaux ennemis. Le général Martin des Pallières se dirige sur Gien (Loiret) pour franchir la Loire, puis marcher par la rive droite sur la forêt d’Orléans et prendre en tenaille les occupants bavarois d’Orléans. Le lieutenant-colonel de Lipowski revient à Châteaudun avec deux mille hommes et surprend cent vingt hussards ennemis qui perdent une trentaine des leurs dont un officier.
Le capitaine Jaurès est mis à la disposition du ministre de la guerre et nommé commandant de la subdivision de Maine-et-Loire. Le 3ème bataillon des Mobiles de Maine-et-Loire est envoyé sur Ecoman pour surveiller la ligne de défense Morée-Ecoman-Moisy (Loir-et-Cher). De nombreux hommes de son unité souffrent de dysenterie ou sont atteints par la vérole.
Lundi 7 novembre
Au cours d’une mission de réquisition, trois cents Prussiens avec trois pièces de canon bombardent le village de Forêt-la-Folie (Eure), tuent des habitants et poursuivent leur marche jusqu’à Guitry (Eure) où ils fusillent six habitants et incendient des fermes. A Brethenay (Haute-Marne), trente-huit soldats de la 2ème Légion de Haute-Marne sont obligés de plier face aux nombreux ennemis ; ils sont faits prisonniers et immédiatement massacrés. La ville de Langres est assiégée et résistera jusqu’au jour de l’armistice.
Aux alentours de Saint-Laurent-des-Bois (Loir-et-Cher) et du lieu-dit La Vallière, alors qu’il pleut, une canonnade se fait entendre. Aussitôt Chanzy engage le combat avec le 3ème bataillon de Marche et le 1er bataillon des Mobiles du Loir-et-Cher qui résistent. Après une marche de dix kilomètres, le 2ème bataillon du Loir-et-Cher vient les renforcer avec l’aide du 4ème Régiment de Marche du général Abdelal et force les Prussiens à se replier. Les pertes prussiennes s’élèvent à cent soixante-quatre soldats et quatre-vingt-trois prisonniers. Quant aux Français, ils ont eu quatre tués et quarante blessés tandis que les Loir-et-Chériens ne subissent aucune perte en homme. Ce premier engagement est un succès pour le 16ème Corps dans lequel les soldats du 2ème bataillon des Mobiles du Loir-et-Cher ont reçu le baptême du feu sous les ordres du commandant Sampayo. Ce fut le cas des moblots montoiriens sous la conduite du capitaine Schneider, dit « le père La Trique ».
Mardi 8 novembre
La citadelle de Verdun capitule abandonnant un important matériel aux Allemands. Deux généraux, cent soixante officiers et environ quatre mille soldats sont faits prisonniers. La ville sera occupée jusqu’au 13 septembre 1873. Fier de son succès de la veille, le 16ème Corps se déploie vers le Loiret tandis que le général von der Thann donne l’ordre au Corps bavarois de quitter Orléans apprenant l’arrivée par Gien de la division du général Martin des Pallières qui risque de le prendre à revers et laisse deux brigades dans le secteur de Baccon (Loiret).
Les troupes des généraux Martineau et Peytavin prennent position entre Messas (Loiret) et le château du Coudray, celles de Chanzy entre le Coudray et Ouzouer-le-Marché ; le général de Reyau se place à Séronville et Prénouvellon ayant sur sa gauche les francs-tireurs de Lipowski. La garde mobile du Loir-et-Cher reçoit le renfort du 4ème bataillon de mobiles du Maine-et-Loire et devient le 75ème Régiment de Mobiles qui fait partie de la 1ère Brigade, de la 1ère Division du 16ème Corps.
Le deuxième bataillon des Mobiles d’Indre-et-Loire s’installe à Montoire fort de mille deux cents hommes, une compagnie se positionne à Lavardin, une autre aux Roches-l’Evêque. Les soldats logent chez l’habitant et assurent le service de garde de la ville en remplacement de la garde nationale montoirienne.
Mercredi 9 novembre
En région parisienne, des combats d’avant-postes ont lieu à Cachan et Arcueil. Garibaldi quitte Dôle pour Autun où il installe son quartier général afin de protéger le flanc Est de l’Armée de la Loire.
Le 15ème Corps se déploie depuis Beaugency (Loiret) jusqu’à Baccon et refoule vers la route d’Orléans à Etampes deux brigades bavaroises qui s’y trouvent. Le 16ème Corps sur la ligne Ouzouer-le-Marché Patay (Loiret) se heurte aux Bavarois. Le 7ème bataillon de chasseurs à pied avec les mobiles de la Dordogne chargent à la baïonnette et enlèvent le village de Coulmiers. La brigade Deplanque s’empare de Rozières-en-Beauce et de Gémigny (Loiret). Les moblots de la Sarthe enlèvent le village de Baccon et subissent d’importantes pertes (quarante-quatre tués et deux cent-vingt blessés).
Les troupes du contre-amiral Jauréguiberry emportent les hameaux de Champs et Ormeteau. Parmi celles-ci, les jeunes moblots du Loir-et-Cher, partis depuis Ouzouer-le-Marché sous la conduite de la 7ème compagnie (Les Montoiriens) en position de tirailleurs, se débandent vers midi sous la première pluie d’obus. Repris en main par leurs capitaines dont Schneider de la 7ème , ils poursuivent leur marche victorieuse et terminent leur journée au lieu-dit Champs, près de Saint-Sigismond (Loiret). Ils déplorent plusieurs tués et une dizaine de blessés. Ils reçoivent l’ordre de cantonner au hameau de Poiseaux, près d’Epieds-en-Beauce (Loiret) où ils s’apprêtent à passer la nuit dans un bourbier.
Le général de Reyau attaque inutilement le village de Saint-Sigismond. Prenant pour des Prussiens la colonne des francs-tireurs de Lipowski qui se déploient sur sa gauche, il décide de rétrograder sur Prénouvellon au lieu de contourner les Bavarois qui remontent vers Artenay, privant les Français d’une complète victoire. Toutes les positions de l’ennemi ont été enfoncées. Chanzy remporte la bataille de Coulmiers. Les Bavarois reculent en direction de Toury. Ces derniers ont huit cents soldats hors de combat et deux mille cinq cent hommes prisonniers tandis que les Français comptent cent-quarante-six tués dont cinq officiers, neuf cent-dix-huit blessés dont trente-sept officiers et deux-cent-vingt disparus.
Cette victoire a un grand retentissement. Gambetta reprend espoir et l’idée d’une sortie du siège de Paris se fait jour. Malheureusement Aurelle de Paladines n’exploite pas ce succès. Il considère que les forces de son armée sont fragiles et il positionne le 17ème Corps en couverture d’Orléans. Chanzy installe son P. C. à Saint-Péravy-la-Colombe protégeant la route de Châteaudun. La neige commence à tomber.
A Vendôme, on est sans nouvelles des engagements qui ont eu lieu vers Marchenoir. La 6ème compagnie des Mobiles du Loir-et-Cher, sous les ordres du capitaine de Terras, quitte la ville pour aller à Fréteval.
Jeudi 10 novembre
Bien qu’ayant réussi à constituer une armée de dix-sept mille hommes dans le nord, le général Bourbaki est rappelé à Tours, à sa demande, parce qu’il est mal ressenti par les Républicains du nord. Gambetta envisage de lui confier le commandement du Corps en formation sur Bourges et Nevers avec une avancée sur Gien. Cette nouvelle unité est destinée à devenir la base de l’Armée de l’Est qui doit intervenir en Franche-Comté. Le colonel Farre, nommé général de brigade, assure l’intérim à l’Armée du nord. La ville de Montbéliard (Doubs) est occupée par l’ennemi.
Von Moltke donne l’ordre à la II° Armée prussienne du prince Frédéric Charles, composée de trois Corps d’Armée, appuyée par la division de cavalerie du général Hartmann et ayant quitté Metz, de se diriger le plus rapidement sur Fontainebleau et Orléans. Le IX° Corps du général von Manstein se déplace sur l’itinéraire Chaumont-Troyes. Le III° Corps d’Alvensleben avance via Sens et Nemours. Le X° Corps de von Voigts-Rhetz prend la route de Châtillon-sur-Seine et Joigny (Yonne).
Les Volontaires de Vendée, sous les ordres du colonel Cathelineau, entrent dans Orléans. Les dix mille soldats du général Fiereck occupent les alentours de Châteaudun. Le Corps bavarois de von der Thann cantonne autour de Toury et fait sa jonction avec les troupes du général von Wittich. Un combat d’arrière-garde se produit à Cercottes (Loiret) faisant suite à la victoire de Coulmiers.
Les Mobiles du Lot défilent à Vendôme sous la neige pour aller se loger dans les environs. Après avoir dormi dans la neige à Château-Renault, de nouvelles troupes arrivent en provenance de Notre-Dame d’Oé (Indre-et-Loire). On est sans nouvelle de vingt-deux Vendômois partis en réquisition avec le 16ème Corps il y a un mois avec trente chevaux. Il est décidé de former un nouveau convoi de réquisition pour les retrouver et les remplacer.
Vendredi 11 novembre
Au cours des discussions sur l’unité allemande, l’intransigeance de Louis II de Bavière oblige chaque état à négocier séparément. Charles 1er , roi du Wurtemberg, ordonne à sa délégation de ne rien signer tant que la Bavière n’a pas donné son accord.
Après le combat de Châlonvillars, les Allemands sont devant Belfort et en commencent le siège. La ville de Neuf-Brisach (Haut-Rhin) se rend après de violents bombardements détruisant deux-cent soixante-cinq maisons sur deux-cent-quatre-vingt. Joigny tombe aux mains de l’ennemi.
Aurelle de Paladines déplace son quartier général à Villeneuve d’Ingré (Loiret) pour se rapprocher d’Orléans. L’Armée de la Loire prend position sur une ligne qui va de Coulmiers à Neuville-aux-Bois. L’ordre est donné de construire des retranchements et des ouvrages de fortification. Mille cinq cent Mobiles du Gers arrivent à Châteaudun. Le Grand-Duc de Mecklembourg-Schwerin est nommé commandant de la subdivision d’armée opposée à l’Armée de la Loire. Il installe son quartier général à Angerville (Essonne).
Les Vendômois qui forment le convoi de réquisition se dirigent vers Marchenoir pour rejoindre Saint-Péravy-la-Colombe. Ils constatent la désolation de la Beauce avec ses fermes incendiées et ses champs saccagés. Ils rencontrent des blessés à la recherche de points d’ambulance qui se font rares. Arrivés à destination, ils trouvent une armée engluée dans la boue au milieu de chevaux morts et de voitures brisées. Les remplaçants sont autorisés à permuter avec ceux qui sont venus les rechercher. M. Edouard Huron rend visite à Gervais Launay pour avoir des nouvelles de la guerre tout en lui confiant les inquiétudes des Montoiriens. Un appel est lancé à la générosité des dames de la ville et à l’organisation de soupes pour les pauvres.
Samedi 12 novembre
La ville se Sens (Yonne) est prise par les Prussiens. Une conférence se tient au quartier général d’Aurelles de Paladines en présence de Gambetta et de Freycinet, au cours de laquelle rien n’est décidé quant à l’objectif de marcher sur Paris. Le 4ème bataillon du Maine-et-Loire est adjoint aux deux bataillons du Loir-et-Cher pour former le 75ème Régiment de Mobiles dont il sera le 3ème bataillon. Il reçoit l’ordre de se rendre à Epieds-en-Beauce.
De nombreux blessés arrivent à Vendôme. On ne sait plus où les accueillir ; l’hospice et le lycée en regorgent. Des points d’ambulance sont organisés chez des particuliers, chez Madame de Sourdis, Deniau et de Trémault. Les camps des régiments d’infanterie s’étendent jusqu’à Meslay, Saint-Ouen et Areines. Les hommes primitivement réquisitionnés sont de retour avec leurs chevaux et leurs voitures. Toutes les troupes stationnées aux environ de Châteaudun s’en vont dans la nuit en partie vers Bonneval et en partie sur les routes d’Orléans et Toury.
Dimanche 13 novembre
A Nemours dans la nuit, les francs-tireurs de Cathelineau, en surveillance en avant de la forêt d’Orléans, enlèvent un demi-escadron de uhlans. Le 17ème Corps, en formation entre Meung-sur-Loire et Vendôme et commandé par le général Durrieu, est placé sous les ordres d’Aurelle de Paladines. Le 3ème bataillon du 75ème Mobiles arrive à Saint-Péravy-la-Colombe où il rejoint les deux autres bataillons. Gambetta adresse une proclamation aux troupes françaises.
La garde nationale sédentaire de Vendôme est passée en revue aux Près-aux-Chats. Les bataillons du Lot sont inspectés par un général. On rencontre en ville toutes sortes de francs-tireurs, d’Indre-et-Loire, de Gironde et même des Américains. Un comité de secours est créé pour venir en aide à la garde mobile, à la garde nationale mobilisée et les francs-tireurs de l’arrondissement de Vendôme.
Lundi 14 novembre
Le IX° Corps prussien vient d’atteindre Fontainebleau. Les troupes du Grand-Duc de Mecklembourg occupent Chartres, Auneau, Ymonville et Voves. L’Armée de la Loire reste dans une attitude de défensive ; par décret de ce jour, Aurelle de Paladines en prend officiellement le commandement en chef. Outre le 15ème , 16ème, et 17ème Corps, on lui adjoint les dix mille soldats de Fiereck.
Le lieutenant-colonel de Lipowski apprend que le prince Albrecht de Prusse se trouve à Viabon (Eure-et-Loir). Il décide de monter dans la nuit une opération pour le capturer. Les Prussiens sont surpris et le prince a à peine le temps de monter à cheval pour se sauver abandonnant sur sa table les ordres du Grand-Duc de Mecklembourg.
A Vendôme, un franc-tireur franco-américain est arrêté porteur de lettres compromettantes et il est pris pour un espion. M. Louis Poirier de la Ville-aux-Clercs est nommé lieutenant officier payeur de la garde mobile du Loir-et-Cher.
Mardi 15 novembre
Afin de contrecarrer les positions de la Bavière et du Wurtemberg sur la constitution de l’unité allemande, Bismarck fait divulguer l’accord d’intégration à la Confédération de l’Allemagne du Nord des Duchés de Bade et de Hesse.
La ville de La Fère (Aisne) est assiégée. A Paris, Jules Ferry est élu maire de la ville. Un combat a lieu à la barricade de Vitry. Un premier train prussien pénètre en France allant jusqu’à Laon (Aisne). Le IX° Corps prussien cantonne aux abords de Milly-la-Forêt (Essonne). Une de ses avant-gardes fait la jonction avec la subdivision d’armée de Mecklembourg qui décide d’établir son quartier général à Auneau. Les francs-tireurs de Lipowski marchent sur Bazoches-les-Hautes, Orgères, Sancheville et Voves (Eure-et-Loir) et, déguisés, envahissent les cantonnements prussiens en semant la terreur.
Les routes menant à Vendôme sont encombrées par des mouvements de troupes, de voitures et de caissons d’artillerie qui n’arrêtent pas de circuler. Les francs-tireurs de la Haute-Vienne, très bien équipés, quittent la ville. Ceux de Tours cantonnent à Courtiras. Des batteries sont érigées à Montrieux, Villiers-sur-Loir et Thoré-la-Rochette. Une cour martiale se réunit à Meslay et condamne à mort le soldat Jean Sastegaray du 45ème Régiment de Marche, originaire des Basses-Pyrénées, pour un refus de faire un service commandé. Un arrêté du préfet du Loir-et-Cher détermine tout ce qui a trait à la formation et l’équipement de la garde nationale mobilisée.
Mercredi 16 novembre
La garnison de Belfort tente une sortie qui échoue et occasionne deux cents morts et soixante blessés côté français. En banlieue parisienne, des escarmouches ont lieu dans les avant-postes de la Varenne-Saint-Hilaire. La 1ère Armée prussienne du général Manteuffel (soixante mille hommes) reçoit l’ordre de quitter Reims et de protéger les troupes allemandes situées au nord du siège de Paris en attaquant l’Armée du Nord.
Le soldat Jean Sastegaray est fusillé à huit heures au Champ de Mars en présence de toutes les unités présentes à Vendôme. Une batterie, sous les ordres du capitaine Durand et du lieutenant Lamarre part prendre position à Fréteval. Un régiment de Marche débarque en gare et va cantonner à Villetrun.
Jeudi 17 novembre
Les Prussiens occupent Dreux, passent Tréon, traversent la forêt de Châteauneuf-en-Thymerais et lancent des reconnaissances jusqu’à Courville-sur-Eure (Eure-et-Loir). Les troupes du lieutenant-colonel Thomas, composées d’un détachement de Mobiles de l’Ardèche et des Francs-Tireurs de l’Iton, s’opposent sur leur droite à leur avancée à Berchères-sur-Vesgre, Houdan et Gressey. Dans ce dernier village, parce que les habitants ont résisté, les Allemands en fusillent neuf de dix-sept à quarante-trois ans. Mecklembourg établit son quartier général à Nogent-le-Roi (Eure-et-Loir) avec l’intention d’avancer par la haute Beauce contre « l’Armée d’Eure-et-Avre » du général Malherbe, dont les avant-postes se trouvent à Senonches (Eure-et-Loir). Le but de la manœuvre est également d’essayer de prendre à revers l’Armée de la Loire. L’Armée de Frédéric Charles arrive à Nemours (Seine-et-Marne). Cent soixante francs-tireurs des Hautes-Pyrénées repoussent à Orgères-en-Beauce une reconnaissance prussienne d’infanterie et de cavalerie.
Cent cinquante voitures chargées de vivres et de munitions arrivent à Vendôme en provenance de Vierzon. Les Mobiles du Lot exécutent une manœuvre dans les environs de la ville où ils cantonnent depuis douze jours dans l’attente de leurs équipements qu’ils n’ont pas reçu depuis leur départ de Cahors, il y a deux mois, cette carence les empêchant d’aller au feu. Sept bataillons dont deux du Cantal, un de ligne, un du Lot-et-Garonne, un de la Sarthe, un de l’Yonne et un des Chasseurs de Vincennes s’installent aux Grand-Près et aux Près-aux-Chats. Le bruit court que le commandant Sampayo aurait trahi, alors que, malade, il vient de regagner Vendôme. L’opinion vendômoise ne comprend pas pour quelle raison près de soixante mille hommes stationnent à patauger dans la boue en ville et dans les environs et pourquoi le 16ème Corps reste immobile à Saint-Péravy-la-Colombe, alors que les Allemands sont toujours en mouvement et que les troupes de Mecklembourg s’avancent dans le Perche pour vraisemblablement atteindre Tours.
Le conseil municipal de Houssay (Loir-et-Cher) emprunte la somme de 2391,21 francs afin de payer la solde, l’équipement et l’armement de sa garde sédentaire.
Vendredi 18 novembre
Le village de Mantoche (Haute-Saône) est l’enjeu d’une escarmouche. La ville de Villeneuve-sur-Yonne essaie de résister à l’avance du prince Frédéric Charles, où quatre gardes nationaux sont fusillés bien qu’ils soient revêtus de leurs uniformes. La garde nationale sédentaire de Chevannes (Loiret) contrecarre la progression de la colonne prussienne en provenance de l’Yonne ; son chef, pris les armes à la main, est fusillé. Le sous-préfet de Montargis signale que trente mille ennemis viennent de s’établir à Pithiviers en provenance de Malesherbes (Loiret). Les Parisiens pratiquent la chasse aux rats qui se vendent deux francs la pièce.
Dans un épais brouillard, l’Armée de Mecklembourg se heurte à celle du général Malherbe sur une ligne passant par Torçay jusqu’à La Loupe (Eure-et-Loir). Les Français opposent une admirable résistance, en particulier les moblots de la Mayenne à Digny (Eure-et-Loir) ; mais inférieurs en nombre (huit mille contre trente mille), ils se replient sur Longny-au-Perche et Mortagne-au-Perche (Orne). Les troupes du général du Temple, poursuivies par les Bavarois qui cherchent à menacer Le Mans, font retraite sur Nogent-le-Rotrou, faisant la jonction avec les détachements du général Fiereck positionnés sur l’axe Bonneval-Nogent-le-Rotrou. Le capitaine de vaisseau Jaurès est nommé général de brigade de l’armée auxiliaire et placé à la tête du futur 21ème Corps en formation au Mans.
Toutes les routes menant à Vendôme sont encombrées par des mouvements de troupes. Les municipalités des environs ont du mal à satisfaire les réquisitions de nos troupes. Les mobiles du Lot-et-Garonne et ceux de l’Yonne occupent les Près-aux-Chats et les Chasseurs de Vincennes campent aux Grands Près. La nuit, tous ces campements forment une guirlande lumineuse. Une quarantaine de blessés ou malades sont transférés sur l’hôpital de Montoire.
Samedi 19 novembre
Des francs-tireurs de l’Armée des Vosges, sous la conduite de Riciotti, un des fils de Garibaldi, lancent une attaque surprise sur la ville de Châtillon-sur-Seine occupée par les Prussiens. Puis en infériorité numérique, ils battent en retraite. Toutes sortes d’humiliation sont ensuite réservées à la population. Dans l’Aisne, des volontaires de la Somme et une compagnie des Mobiles du Gard attaquent la ville de Tergnier pour soulager la garnison de La Fère qui est assiégée. Les assaillants sont repoussés jusqu’à Vouël où près de mille Allemands sont retranchés. Les Mobiles du Gard se replient sur Ham (Somme). L’Armée de Frédéric Charles est signalée à Puiseaux (Loiret).
Une dépêche parvenue dans la nuit prescrit le départ de toutes les troupes rassemblées à Vendôme et les environs soit vers Châteaudun, soit vers Marchenoir. Seul le quartier général du 17ème Corps en cours de formation est maintenu avec une compagnie de Mobiles du Gers chargée de nettoyer la Quartier. Les Mobiles du Lot reçoivent l’ordre de se porter sur Fréteval dès le lendemain.
Dimanche 20 novembre
A Nuits-Saint-Georges (Côte-d’Or), cinq cent francs-tireurs du Jura harcèlent une colonne badoise pendant cinq heures, puis sont obligés de se retirer. L’avant-garde des troupes du prince Frédéric Charles occupe Montargis, mais le gros des troupes est encore à deux jours de route. Mecklembourg a l’illusion de repousser l’Armée de la Loire dans le Perche, alors qu’il se heurte à des petits détachements isolés qui retardent sa progression vers Le Mans. Les troupes parisiennes tentent des percées à travers les lignes ennemies sans succès.
Au Mans, le général Fiereck remet le commandement du 21ème Corps en formation au général Jaurès.
A Vendôme, un bataillon de marche transite en ville pour rejoindre Marchenoir. Un important convoi de blessés arrive en gare. L’hospice n’ayant plus de places disponibles, un grand nombre est dirigé sur Quimper.
Lundi 21 novembre
Le général Zabrow, commandant du 7ème Corps allemand, entre dans Auxerre. A la limite de l’Orne et de l’Eure-et-Loir, les troupes du colonel Rousseau affrontent celles du général von Wittich. Des combats ont lieu dans l’Eure-et-Loir à Thiron-Gardais (soixante ennemis tués pour vingt français) et dans l’Orne à La Madeleine-Bouvet, à la Fourche et à Bretoncelles. Dans ce dernier village, quatre compagnies de la Mobile du Finistère-Morbihan et le 10ème bataillon d’Infanterie de Marine sont accrochés par les Prussiens et leur retraite est dangereusement menacée. Le général Jaurès décide de se porter à leur secours avec un bataillon de zouaves pontificaux sur Nogent-le-Rotrou et Bellême (Orne) où il rallie huit mille soldats hors d’état de combattre et tient en échec l’avant-garde ennemie. De nuit il gagne Mamers (Sarthe).
Les forces du prince Albrecht occupent Illiers et envahissent Yèvres et Brou (Eure-et-Loir). Le capitaine Chabrillat des francs-tireurs de la Seine enlève de nuit à Santilly (Eure-et-Loir) un poste du 8ème hussard poméranien.
Décédé de la vérole noire, le commandant Sampayo, chef du 2ème bataillon des Mobiles du Loir-et-Cher, est enterré à Vendôme.
Mardi 22 novembre
Face à la pression des troupes bavaroises, les troupes du colonel Rousseau sont forcées de se replier sur Nogent-le-Rotrou, Bellême et Le Mans. Une reconnaissance d’uhlans est signalée à La Ferté-Bernard (Sarthe). Des cavaliers ennemis ont été vus à la Bazoche-Gouet et au Gault-du-Perche (Loir-et-Cher).
Apprenant la présence de Bourbaki à Amiens, le général Manteuffel décide de quitter Compiègne et de s’y diriger pour l’attaquer, bien qu’il ne dispose pas de l’ensemble de ses forces. Les Mobiles de l’Ardèche contiennent les Prussiens dans leur tentative de prendre Vernon (Eure).
La garde nationale montoirienne reprend la surveillance de la ville, car les Mobiles d’Indre-et-Loire se replient sur Château-Renault. Ce mouvement est dû à l’avance des Prussiens en Beauce et dans le Perche. La délégation gouvernementale veut renforcer la protection de la ville de Tours. Mais les Allemands n’insistent pas dans cette direction et prennent position dans le Perche, préférant faire pression sur l’axe Châteaudun-Vendôme. Ils occupent Mondoubleau et Savigny-sur-Braye et l’apprenant de nombreux Montoiriens quittent leur ville.
Mercredi 23 novembre
La Bavière signe son accord pour entrer dans la Confédération de l’Allemagne du Nord. Le roi Louis II de Bavière, après avoir négocié secrètement avec Bismarck, obtient des dédommagements financiers et à titre personnel le versement d’une rente à vie.
Le général Faidherbe, toujours en Algérie, est désigné pour prendre le commandement de l’Armée du Nord en remplacement de Bourbaki. Pour cela, il est nommé général de Division. Pour leur baptême du feu, un millier de Mobiles du Doubs attaquent à Voujeaucourt avec succès un convoi de vivres prussien et s’en emparent en fin de la journée. Le capitaine Cremer est nommé général de Brigade par Gambetta. Il est chargé de former une brigade d’infanterie à Chagny (Saône-et-Loire) afin de remettre de l’ordre dans l’Armée française en Bourgogne. Le général Jaurès est de retour au Mans après avoir secouru le détachement de huit mille hommes en difficultés à Bretoncelles.
La garde nationale sédentaire de Saint-Agil (Loir-et-Cher) se porte au-devant de l’ennemi vers Souday et Oigny. En infériorité numérique (cinquante contre sept cents) , elle décide de se disperser et de revenir au village.
On annonce aux Vendômois que la garde nationale est convoquée pour marcher contre l’ennemi ; car des Bavarois sont à Mondoubleau où ils ont fait une cinquantaine de prisonniers. Un train spécial doit l’emmener à Cloyes d’où elle partira pour Droué. Le sous-préfet réunit sous ses ordres quatre cents gardes, cent Mobiles du Gers et cinquante francs-tireurs de la Seine. Ils arrivent à onze heures du soir à Droué. Les gardes nationales des villages environnants sont appelées en renfort sur Vendôme.
Jeudi 24 novembre
La ville de Thionville (Moselle) capitule après trois mois de siège. Les Allemands font quatre mille prisonniers et saisissent deux cents canons.
A l’Armée de la Loire, la 1ère Division du 15ème Corps du général Martin des Pallières stoppe l’avance du 3ème Corps allemand aux combats de Mézières-en-Gâtinais, de Boiscommun, de Chilleurs-aux-Bois et de Neuville-aux-Bois (Loiret). A Ladon (Loiret), mille quatre cents fantassins appartenant aux Mobiles de la Loire, de la Haute-Loire et au 44ème Régiment de Marche tiennent en échec quatre mille fantassins allemands. Ce combat fait deviner au prince Frédéric Charles les intentions de Gambetta de se porter au secours de Paris. Une colonne de trois cents dragons hessois est mise en fuite à Montbarrois (Loiret) par deux escadrons de lanciers français.
Les gardes nationales de Thoré-la-Rochette, de Villiers, de Rocé et de Saint-Amand, appelées en renfort, sont renvoyées dans leurs communes. Les gardes nationaux vendômois qui n’étaient pas partis la veille reçoivent l’ordre de gagner Cloyes par le train et de rejoindre vers Droué le premier détachement. Après avoir fait leur jonction, cette troupe va errer de villages en villages dans le Perche-Gouet sans rencontrer le moindre Prussien, à l’exception du sous-préfet et des Mobiles du Gers qui engagent une fusillade contre la maison du maire de Saint-Agil occupée par des Prussiens. Le maire de Vendôme convoque l’autorité militaire pour connaître sa détermination de défendre ou non la ville. Cette dernière répond qu’en considération des forces occupant la ville, il n’y a pas lieu de la défendre. Dans ces conditions, il faut désarmer la garde nationale qui est absente…
Les soixante-huit prisonniers de Mondoubleau sont conduits jusqu’à Épuisay et enfermés dans l’église. Les Montoiriens apprennent que les Bavarois du grand-duc de Mecklembourg sont à Saint-Calais (Sarthe) et que des éclaireurs ont atteint Épuisay et Fortan. L’inquiétude grandit et des habitants décident de s’enfuir. M. Chauvin, notaire à Sougé, est tué auprès de Mondoubleau, accompagnant des gardes nationaux, l’ennemi l’a considéré comme un franc-tireur. Quelques gardes nationaux de Trôo et de Lavardin viennent à leur mairie pour prendre des ordres pour la défense de leur village.
Vendredi 25 novembre
Le Wurtemberg donne son accord pour être admis dans la Confédérations de l’Allemagne du Nord. Un petit groupe de francs-tireurs garibaldiens attaque deux postes prussiens à Auxon (Aube) qui lâchent prise se croyant attaqués par des forces plus nombreuses. Des combats d’avant-garde se déroulent à Velars-sur-Ouche (Côte-d’Or) où les francs-tireurs de la colonne du général polonais Bossack sont repoussés par deux bataillons badois. Le général de Sonis attaque à Brou (Eure-et-Loir) avec succès la formation du grand-duc de Mecklembourg qui marchait sur Saint-Calais et Vendôme. Une escarmouche se produit à Espéreuse près de Danzé (Loir-et-Cher) entre les francs-tireurs de la Seine et un détachement prussien. Trente-neuf prisonniers de Mondoubleau sont délivrés de l’église d’Épuisay, mais subissent individuellement une bastonnade en sortant.
Gambetta publie un décret créant onze camps pour l’instruction et la concentration des mobilisés, dont celui de Conlie (Sarthe). Un conseil de guerre se tient à Salbris pour définir le projet de délivrer en premier lieu Orléans, puis ensuite libérer Paris. Il est décidé de passer à l’offensive à partir de Blois.
Après leur expédition dans le Perche-Gouet, la plupart des gardes nationaux vendômois sont de retour en provenance de la Ville-aux-Clercs. La détermination de ne pas défendre la ville est changée par l’arrivée de nouvelles troupes. Les Prussiens sont annoncés sur Montmirail (Sarthe), Saint-Avit, Le Plessis-Dorin, Souday et Mondoubleau. Les habitants sont alertés par l’arrivée de quatorze Uhlans à Courtiras, faubourg de Vendôme ; ils rebroussent chemin. Le sous-préfet regagne la ville en soirée.
Vers deux heures du matin à Montoire, le maire, Mr. Debourges, a la confirmation que des Bavarois sont à Savigny-sur-Braye. La nouvelle se répand immédiatement et certains habitants s’empressent de cacher dans les caves leurs biens les plus précieux. À quatre heures du matin, le conseil municipal délibère sur l’attitude à tenir avec la garde nationale montoirienne. Dans la matinée, des gardes nationaux de Trôo et de Lavardin se rassemblent sur la place. Mal équipés et considérant leur inutilité, ils sont renvoyés dans leurs villages.
Face à la situation inquiétante, une compagnie de la garde nationale se porte en observation sur le hameau de Valleron, l’autre sur la route de Vendôme. Les gardes sont équipés d’un fusil et douze cartouches. Un habitant de Savigny survient en signalant l’arrivée imminente de l’ennemi. Les deux compagnies se replient. Aucune troupe ennemie n’apparaît et à la nuit les gardes rentrent chez eux, laissant une garde à Valleron. C’est alors que quatorze cavaliers uhlans en provenance de Lunay traversent les Roches-l’Evêque et s’approchent de Montoire. Ils entendent les sons de tambours et des clairons ; ils croient que la ville est occupée par les troupes françaises et rebroussent chemin. C’était la garde nationale qui sonnait la retraite comme elle le faisait chaque soir.
Le capitaine Odoul, préposé par le gouvernement de Tours à la défense de l’arrondissement de Saint-Calais, adressent des instructions à toutes les gardes nationales dont celle de Houssay :
« il est prescrit aux officiers de la garde nationale :
- de se porter comme exercice sur les points par où devra arriver l’ennemi, de faire le simulacre de la défense et de conduire leur force armée jusqu’à 20 kms en avant des localités qu’ils habitent,
- chaque détachement constitué devra bivouaquer au moins une nuit et se garder militairement (sentinelle, rondes, patrouilles, mots d’ordre »
Samedi 26 novembre
Garibaldi échoue dans sa tentative de reprendre Dijon. La forteresse de La Fère capitule, une grande partie de ses maisons est détruite. Au hameau de Maule près de Blaru (Eure), les Mobiles de l’Ardèche, renforcés par un détachement en provenance de Vernon, enlèvent à la baïonnette la position d’artillerie des Prussiens. En représailles la ville d’Auxon est incendiée et pillée. A Lorcy (Loiret), une colonne du 18ème Corps français accroche les flancs-gardes du 10ème Corps allemand.
Au soir, le général Farre positionne son armée (dix-sept mille soldats) sur une ligne de vingt-cinq kilomètres allant de Pont-de-Metz à Villers-Bretonneux (Somme) et Corbie à l’est. Il dispose en plus des huit mille hommes de la garnison d’Amiens commandée par le général Paulze-d’Ivoy. Les Allemands enlèvent le village de Gentelles (Somme). Le général Lecointe contre-attaque, reprend le village et poursuit l’ennemi jusqu’à Domart-sur-la-Luce où il est stoppé.
Les gardes nationaux de Villiers interceptent des éclaireurs ennemis dans les bois de Courtozé. Avec l’aide d’un groupe de francs-tireurs, ils les oblige à se replier sur Azé. On compte deux blessés parmi les francs-tireurs. Le capitaine Herpin-Lacroix, commandant des Francs-tireurs du Loir-et-Cher, attaque les Bavarois à Galette près d’Azé et les poursuit jusqu’à Mondoubleau. Trois hommes accusés d’espionnage sont amenés à Vendôme. Des éclaireurs ennemis sont signalés à Romilly, à Lisle et à La Ville-aux-Clercs.
A cinq heures du matin, la garde nationale montoirienne est sur pied. La compagnie du capitaine Barilleau retourne sur Valleron. La deuxième sous les ordres du commandant de La Tournelle se dirige vers le hameau du Tertre, puis remonte vers Lunay. A midi des éclaireurs de Montoire aperçoivent quatre cavaliers à la ferme de la Barre et font feu sur eux sans les toucher. La décision est prise de marcher sur Lunay. Un détachement de cinquante-trois Allemands vient d’investir le village et de désarmer sa garde nationale en brisant leurs fusils. En formation de tirailleur, les gardes montoiriens encerclent en partie le bourg et subissent un tir isolé. Peu de temps après un habitant envoyé par le maire, Mr. Fourmy, leur défend d’entrer dans le village pour éviter le pillage. Finalement l’ennemi se retire sur Fortan. Le soir, la compagnie du capitaine Barilleau, restée en surveillance à la Barre, apprenant d’un paysan qu’une formation ennemie s’avance vers Montoire, regagne la ville. Il s’avérera que l’information était fausse. Quelques jours plus tard, Mr. de Marçay, sous-préfet de Vendôme, fit arrêter Mr. Fourmy parce qu’il avait laissé se désarmer sa garde nationale et le fit conduire à Tours où il fut emprisonné quelques jours.
Dimanche 27 novembre
Aux portes d’Amiens, les quarante mille soldats de Manteuffel enlèvent sans trop de difficultés les positions françaises de Dury, Boves et Villers-Bretonneux face à de jeunes recrues qui subissent le feu pour la première fois. Les troupes d’active se comportent honorablement tandis que les moblots reculent immédiatement et s’enfuient. Ayant perdu du terrain sur toute le ligne de bataille et à court de munitions, Farre décide de battre en retraite sur Albert, Doullens et Arras. Les Français comptent mille trois-cent-quatre-vingt-trois tués ou blessés et environ mille disparus. Il y a de nombreux déserteurs.
Le général Jaurès, à la tête de trois Divisions du 21ème Corps en formation au Mans, part rejoindre l’Armée de la Loire. Vingt mille soldats ennemis réoccupant la ville de Châteaudun, son chef de gare et des employés du télégraphe se replient sur Vendôme. Les Allemands quittent le Perche et le Vendômois pour se positionner à hauteur de Châteaudun. Cent soixante francs-tireurs des Deux-Sèvres, très bien équipés, viennent s’établir dans les environs de Vendôme. M. de Marçay ordonne une nouvelle expédition ; il s’agit d’envoyer des gardes nationaux couper les routes entre vendôme et Cloyes ainsi qu’à Binas, Ecoman, Morée et Fréteval. Un arrêté est placardé sur les murs qui stipule que les gardes nationaux sont « placés sous le régime des lois militaires ».
A Montoire, Mr. de La Tournelle réunit la garde nationale et, mécontent des critiques qui lui ont été adressées, souhaite démissionner. L’ensemble de la garde lui demande de rester, ce qu’il fait. Les gardes retournent en observation jusqu’à La Barre et ne sont mis en présence d’aucun ennemi.
Lundi 28 novembre
Le général Goeben s’empare d’Amiens à l’exception de la vieille citadelle où trois cent Mobiles résistent. Manteuffel décide de na pas poursuivre l’Armée du Nord. Il fait positionner les troupes de Goeben le long de la rivière de la Somme et prend la direction de la Normandie avec le reste de ses forces.
Chanzy rapporte qu’à La Chapelle-Onzerain « le colonel Lipowski ayant eu ses avant-postes attaqués toute la nuit, s’est replié à deux heures sur Tournoisis (Loiret) ». Aurelle de Paladines décide d’attaquer le prince Frédéric Charles à Beaune-la-Rolande (Loiret) où vingt mille de ses soldats sont retranchés. Trente mille français sont déployés en vue de cette opération. Deux tentatives pour enlever la ville sont repoussées. Le général Crouzat renonce à bombarder la ville, seule solution pour venir à bout de l’ennemi et lance une attaque de dernière chance vers la barricade de Boiscommun ; elle échoue. La nuit tombe et l’aile gauche française cède. La confusion règne parmi les troupes françaises qui regagnent leurs bivouacs antérieurs. Côté français, on compte mille tués et trois mille cinq cents blessés ou prisonniers ; les Prussiens perdent huit cent-cinquante-huit soldats tués et trente-huit officiers. D’autres combats se déroulent à Lorcy et Juranville (Loiret).
Les gardes nationaux vendômois envoyés la veille couper les routes à Morée, Écoman et Binas sont de retour. En fin de soirée des Mobiles logeant au Quartier sont expédiés précipitamment sur Montoire et Épuisay.
Un capitaine de corps franc appartenant à un détachement en position à Sougé se présente à Montoire dans le but d’examiner la situation dans le secteur et d’organiser la défense. Les habitants le soupçonnent d’être un espion. Il est gardé à l’hôtel du Lion d’Or où il loge. Le lendemain douze gardes nationaux le conduisent à Sougé où il se fait reconnaître. Il revient à Montoire avec cent quatre francs-tireurs qui couchent chez l’habitant et repartent le lendemain.
Mardi 29 novembre
En région parisienne des combats ont lieu à L’Haÿ-les-Roses, Choisy-le-Roi, Aubervilliers, Gennevilliers et au mont Valérien. A Etrepagny (Eure) un escadron saxon est défait par des gardes mobiles commandés par le général Briand. Au pont de Varize (Eure-et-Loir), cent cinquante francs-tireurs de Lipowski empêchent pendant cinq heures dix mille Bavarois de franchir la rivière.
Gambetta et le gouvernement ordonnent à Aurelle de Paladines de monter une opération sur Pithiviers pour poursuivre ensuite sur Fontainebleau et Paris. Le général estime que les chances de succès sont peu probables et il temporise. ; il pense se replier au sud de la Loire, mais Gambetta lui donne l’ordre de se défendre au nord d’Orléans. L’Armée du prince Frédéric Charles, après avoir anéanti sur sa route à Ladon les Mobiles de la Haute-Loire et les francs-tireurs du Doubs, poursuit sa route vers Orléans.
On annonce pour demain à Vendôme le passage de très nombreuses troupes nécessitant une commande de quarante mille rations. Dans son journal, Gervais Launay résume que la situation militaire ne s’est pas bonifiée : « La guerre à outrance semble être dans les intentions du gouvernement malgré les insuccès éprouvés. Notre seul espoir est dans l’armée de Paris et dans celle de la Loire… »
Une dépêche parvient au bureau de télégraphe de Montoire précisant les forces ayant investi Savigny : « Les Prussiens, au nombre de dix mille environ, arrivés à Savigny le 25 avec quarante pièces de canons et quatre mitrailleuses. Une partie a évacué le bourg le 26, à six heures du matin, le reste le 27 au matin. L’ennemi se dirigeait vers Mondoubleau et Saint-Agil. Il a fait de fortes réquisitions de foin, d’avoine, de vêtements ; pris six chevaux et deux voitures. Le général a couché chez Mr. Lebatteux. Les capitaines de la garde nationale Renard et Hubert ont été enfermés dans l’église d’Épuisay. M. Chauvin, ex-notaire de Sougé a été fusillé à Montmarin. Quarante jeunes gens qui étaient prisonniers dans l’église d’Epuisay ont été renvoyés à coup de bâtons ».
Les Montoiriens sont inquiets, car les Prussiens sont annoncés sur Vendôme. La garde nationale part en éclaireurs jusqu’à Mazangé sans rencontrer de troupes ennemies. Des éclaireurs de l’armée régulière française viennent jusqu’à Montoire en provenance de Château-Renault (Indre-et-Loire)
Mercredi 30 novembre
Le général Cremer remporte la bataille de Nuits-Saint-Georges. Des combats se déroulent à Choisy-le-Roi et à Epinay. Dans cette dernière commune, l’amiral La Roncière-le-Noury et la brigade Henrion enlèvent le village et font soixante-douze prisonniers. Le général Ducrot franchit la Marne sur des pontons entre Joinville et Bry-sur-Marne ; les Français disposent de soixante-quinze mille soldats et deux cent cinquante-deux canons, les Prussiens alignent cinquante mille fantassins, quatre mille cavaliers et cent soixante-huit canons. Les multiples attaques des assiégés échouent face à la résistance ennemie. A la nuit les combats cessent et les Français restent maître de Champigny et Bry-sur-Marne, mais perdent cinq mille hommes tandis que les Allemands en comptent deux mille. À l’armée de la Loire, des escarmouches se produisent à Mézières-en-Gâtinais, à Boiscommun et Nancray-sur-Rimarde (Loiret).
« A Vendôme, les fièvres, la dysenterie, la petite vérole surtout, font chaque jour de nouvelles victimes, et les progrès en sont effrayants… » note Stanislas Neilz dans son journal. Deux bataillons de Mobiles sont dirigés sur la forêt de Fréteval. Il ne reste presque plus de troupes en ville.
Les gardes montoiriens poursuivent leurs reconnaissances aux environs allant jusqu’à Savigny et même une nuit jusqu’au Camp de César à Sougé.